LE CINACIEN Abbé EMILE REXAILI), Aumônier, X 61, A T. Souhaits de Nouvel An. ('.'était l'après-midi du .'51 décembre, l'n pâle soleil, perçant ma croisée, découpait, sur la tenture sombre de la paroi, l'image lumineuse de ma fenêtre. Sur cette tache de clarté, sans cesse, mon regard attentif voyait passer des ombres, folles, compliquées, audacieuses, tortueuses, ou bien basses et traînantes. Rêveur, je voulus y voir comme l'e défilé de tous les événements de l'année mourante. Les ombres aux formes fantastiques, déroulant leurs volutes, c'étaient les jours de combats, ceux que nous avions vus ou ceux qui s'étaient passés loin, mais dont le tonnerre avait roulé jusqu'à nous ses bruits immenses de victoire et d'espérance. Les ombres basses et comme rampantes, c'était l'image des jours d'attente, où, dans le calme revenu sur le front des combats, nous attendions et espérions l'avenir dans une morne torpeur. Je les contemplai aussi, longtemps, fidèles symboles, en leurs mouvements, des tourments du passé. Puis, peu à peu, l'image s'assombrit : la nuit venait. Elle s'éteignit bientôt tout à fait, comme mourait, en celte soirée, l'année finissante. De l'image pleine de clarté, il ne resta, dans les ténèbres, que le souvenir ; de même que, des douze mois écoulés, il ne survivait que la gloire des morts et l'espérance tenace des vivants. Dans la nuit, complète maintenant, ma chambre n'était plus éclairée que par les sursauts de l'àtre où brûlaient quelques bûches. Je l'attisai machinalement, et voici que, des brandons qui s'éteignaient, je vis surgir, en des flammes bondissantes, toute l'image d'une vie nouvelle. D'abord ce furent de petites flammes, blanches; nettes, volontaires qui faisaient éclater la gangue du bois pour s'échapper. Puis, lorsqu'elles eurent comme pris conscience, d'elles-mêmes, elles se soudèrent dans une belle union. L'àtre, dès lors, devint le théâtre oû s'ébattait une seule flamme, énorme et rougeoyante, puissante et claire, se tordant comme une Loïe-Fuller, ou s'élançant puissante, bri sant les obstacles qui semblaient lui tendre des voiles tic fumée bleue. Moi, tout plein encore de la contemplation du passé, je me mis à désirer que le drame minuscule qui animait cette flamme devint pour tous, et pour Vous particulièrement, chers Cinaciens,l'image de l'avenir.Commencez l'année avec cette allure volontaire et décidée des flammes du foyer qui s'allume. Manifestez cette disposition dans tous les domaines cpii vous sont ouverts : dans la guerre en voulant la victoire, dans la vie en voulant l'ordre, en vous-même en voulant la beauté. Lorsque vous aurez commencé l'année, partant de ces prémices salutaires, (pie vos efforts se coordonnent pour aboutir à cette grande flamme active et vivante, condition du bonheur et de la vraie vie. Vous épanouissant comme la flamme, marchez donc dans la vie, les yeux clairs et le cœur large. Sonne l'heure de la paix ! vos familles en vous ouvrant les bras, diront alors (pie l'œuvre de la victoire, que vous avez bâtie' par vos armes, n'est ni si grande ni si belle encore que l'œuvre d'humanité (pie vous aurez construite en Vous-mêmes. Quelle belle heure, pleine de joie, riche d'espérances, ce sera là ! Que Dieu vous donne à tous de la vivre, après avoir échappé aux dangers mortels de ,1a guerre ! Tels sont les souhaits du Cinacien. La vie à Ciney. « Patience et longueur de temps..... » Le « Cinacien, » fidèle à son programme, apporte aujourd'hui, à ses lecteurs, une vértiable corne d'abondance, débordante de nouvelles, de renseignements inédits, de détails intéressants, d'anecdotes et de récits. Puissiez-vous, amis lecteurs, trouver dans ces pages le réconfort moral que vous venez y puiser : nous nous sommes attaché d'une façon toute particulière, à faire ressortir la grandeur d'âme, la confiance, la persévérance et l'élévation des sentiments de nos chers compatriotes qui, là-bas, Autorisé par la Censure Janvier-Février 1918.

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