Journal de Gand: politique, industriel, commercial et littéraire

1253 0
close

Why do you want to report this item?

Remarks

Send
s.n. 1915, 06 June. Journal de Gand: politique, industriel, commercial et littéraire. Seen on 28 March 2024, on https://nieuwsvandegrooteoorlog.hetarchief.be/en/pid/ft8df6pf8z/
Show text

Over deze tekst

Onderstaande tekst is geautomatiseerd gemaakt met OCR (Optical Character Recognition). Deze techniek levert geen 100% correct resultaat op. Dit komt mede doordat oude drukken moeilijker te lezen zijn met software dan moderne. Dat betekent dat er onjuiste tekens in de tekst kunnen voorkomen. Er wordt gewerkt aan verbetering van de OCR software. 

Dimanche (î et lundi 7 juin £3 centimes le numéro 59me année - 157-138 JOURNAL DE GAND ABONNEMENTS : BELGIQUE : H fr. par an ; r* fr. pour six mois ; 2 fr. pour trois mois Pour l'étranger, le port en sus RÉDACTION & ADMINISTRATION : 3, IRTTïD IDE FLANDRE, 3, GANI TÉLÉPHONE 665 ANNONCES : Voir le tarif au bas de la dernière page du journal. A nos lecteurs n iiw># iv«.««.ui i# Le numéro du Journal de Garni qui est mis I en composition le samedi matin doit être en-[ myé à la Censure le samedi après-midi avant I quatre heures. Il nous est restitué dans l'avant-soirée. Nous devons ensuite opérer les suppressions I exigées par la Censure, imprimer une nouvelle I épreuve et la communiquer au Bureau J'-* lu I Censure le dimanche matin à huit heures I CVm alors seulement qu'est délivré le I à tirer ». Autrement dit ce n'est qu'à partir de I ce moment que nous avons le droit de fai: e I imprimer, distribuer et vendre le Journal. Il en est ainsi tous les jours de la semaine Mais le service de lu Censure ne fonctiurne I que le dimanche matin. D'où il résulte que le numéro du Journal I distribué et vendu à Gand le lundi, doit être I mmposé le samedi après-midi, — au moment I uù s'achève à peine la mise en page du numé-I ro précédent — remis au Bureau de la Cen-I sure le dimanche matin et repris pour que nous | obtenions le lundi matin l'autorisation de le dé-I liiter et de l'envoyer à nos abonnés. Il nous faut donc rassembler le samedi les I éléments de deux numéros du Journal, à qttel-I ques heures d'intervalle. Or, dans ce délai, aucune dépêche n'est affichée à Gand, aucune nouvelle ne peut nous parvenir de l'étranger.Dans ces conditions, nous ne pouvons nous I dissimuler que le numéro que nos abonnés reçoivent le lundi est, au point de vue de l'information, dépourvu d'intérêt, en dépit de toute notre bonne volonté et de tous nos efforts. Autant vaut le supprimer; c'est à quoi nous nous décidons. Le Journal de Gand ne par." tra donc plus que six fois par semaine. La fin d'un régime III n'est personne, sans doute, qui ait pu se défendre d'un frisson d'épouvante en apprenant ces jours derniers, par une statistique, que les deux tiers de l'humanité, soit à peu près 962 millions d'individus, sont entraînés dans la guerre actuelle, personne qui n'ait senti au fond de sa conscience s'élever un cri de révolte : ! « C'est assez ! Paix aux peuples, et guerre à la guerre ! » Mais il faut que les événements ! suivent leur cours et que, pendant des mois et des mois, s'accumulent les désastres et les | hécatombes. Jamais peut-être la célèbre page écrite par J. de Maistre, en 1821, sur la guerre, n'a paru plus juste et plus prophétique : « Cependant, quel être exterminera celui qui les exterminera tous ? Lui ! C'est l'homme qui est chargé d'égorger l'homme. Mais comment pourra-t-il accomplir la loi, ! lui qui est un être moral et miséricordieux, lui qui est né pour aimer, lui qui pleure sur les I autres comme sur lui-même ?.... C'est la guerre ; qui accomplira le decret.... L'homme, saisi tout à coup d'une fureur « divine », étrangère à la haine et à la colère, s'avance sur le champ de bataille sans savoir ce qu'il veut, ni même ce ! qu'il fait.... Rien n'est plus contraire à sa nature, ! et rien ne lui répugne moins : il lait avec ! enthousiasme ce qu'il a en horreur. » Et plus loin : « L'ange exterminateur tourne comme le soleil autour de ce malheureux globe et ne laisse respirer une nation que pour en frapper d'autres. Mais lorsque les crimes se sont accumulés jusqu'à un point marqué, l'ange presse sans mesure son vol infatigable. Pareil à la torche ardente tournée rapidement, l'immense vitesse de son mouvement le rend présent à la fois sur tous les points de sa redoutable orbite. Il frappe au même instant tous les peuples de la terre....» Depuis quelques mois, cette vision apocalyptique de l'écrivain semble s'être réalisée, et cela au moment où le pacifisme paraissait devoir triompher définitivement du barbare atavisme, où la philantropie paraissait devoir dominer toute la vie sociale. Jamais l'humanité n'avait paru aussi miséricordieuse; jamais la science, la philosophie et le talent n'avaient aussi vaillamment lutté contre la souffrance sous toutes ses formes ; tous les jours se fondaient de nouvelles oeuvres d'assistance et de protection; tous les jours on tentait de sauver la vie à des milliers d'individus tarés, usés ou infirmes. Et c'est alors que, de propos délibéré, on envoya vers les champs de carnage des millions d'hommes jeunes et forts, espoir de leur race et de leur nation. Est-ce donc qu'un vent de folie a soufflé sur le monde, ou qu'une volonté surhumaine a résolu d'exterminer les fils de Caïn ? Non, c'est qu'un régime devait finir pour faire place à des temps nouveaux, et que la guerre effroyable que nous subissons était l'inévitable aboutissement des fautes de ce régime. La course aux armements, d'une part, et, d'autre part, l'universelle ruée à l'argent et aux plaisirs d'où naissaient tant des crimes antisociaux, devaient provoquer le cataclysme où sombrera une société de spéculation et de finance, dont l'apparente philanthropie cachait mal le féroce égoïsme. Ce cataclysme, espérons-le, marquera sans doute aussi l'aurore d'une ère de justice et de fraternité. Déjà, dans tous les pays, des voix s'élèvent en faveur de la paix, et peut être que demain verra se réconcilier à jamais les races et les peuples. C'est la foi en ce miracle qui doit relever nos courages en ces heures tragiques, et nous donner la force de réédifier l'avenir sur les ruines présentes. Puissions-nous dire bientôt, comme Monna Vanna : « C'était un mauvais rêve, le beau va commencer.... » ÉCHOS Le trafic postal avec la Suisse Le trafic postal avec la Suisse est autorisé à partir du 1er juin de Bruxelles,Verviecs, Liège, ainsi que d'Anvers, Hasselt et Welkenraedt, sans les faubourgs ou endroits limitrophes. Les conditions sont les mêmes que celles appliquées au trafic avec l'Allemagne, le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Autriche-Hongrie, la Bosnie-Herzégovine et le Danemark. La viande rare à Paris Des frontières hollandaises, 3 juin. — La viande devient rare à Paris. Le correspondent du Daily Telegraph communique que le prix du bœuf de première qualité a monté jusqu'à ir. 3,25 le kilo ; la viande de qualité inférieure se vend aussi cher que les meilleurs morceaux sn Angleterre. Encore cette semaine le prix a augmenté de 10 centimes. L'approvisionnement souffre sensiblement par suite de l'occupation d'une partie du pays par les Allemands ; d'un autre côté les soldats fran-jais sont richement ravitaillés en viande. La France qui, en temps ordinaire, peut se îourrir de son bétail, demande en temps de juerre une importation de 30,000 bêtes par nois. Le Parlement a voté une loi permettant 'importation de viandes congelées. Le prix du vin a diminué. Le pain n'est pas Mus cher qu'en temps normal. LA GUERRE Sur le front occidental Bulletin onieiel allemand 4 juin, W. T. B. - Le château et le village de Hooge, à l'Est d'Ypres, à l'exception de quelques maisons, sont occupés. Une contre-attaque anglaise a échoué avec pertes sanglantes.A l'Est de Givenchy les Anglais ont été forcés d'abandonner notre position, qu'ils avaient prise. Nous avons capturé trois mitrailleuses. La position est entièrement en notre possession. La sucrerie est dans nos mains après des combats violents. Au chemin de fer, à l'ouest de Souciiez, la bataille continue. Près de Neuville, une attaque énergique de l'ennemi s'est écroulée sous notre feu d'artillerie. Au Sud de Neuville, le combat continue. Au Bois le Prêtre le combat est fini. La plupart des tranchées ont été prises. Bulletins officiels français Paris, 2 juin (15 heures). — Dans le secteur au Nord d'Arras, le combat s'est poursuivi cette nuit. Dans le «Labyrinthe», au Sud-Est de Neuville, nous avons pris quelques tranchées. A Neuville-Saint-Vaàst même nous avons conquis un groupe de maisons, où nous nous sommes maintenus malgré plusieurs contre-attaques..Sur le reste du front rien à signaler,si ce n'est un bombardement deux fois répété de Reims. Paris, 2 juin (23 heures). Au Sud-Est de Neuville-Saint-Vaast l'ennemi a contre-attaqué dans le « Labyrinthe »; nous l'avons repoussé. En Champagne l'ennemi a tenté une attaque de nuit près de Beauséjour. Aux lisières du bois Le Prêtre nous avons repoussé deux violentes attaques ennemies. Sur le front oriental Bulletin officiel allemand Berlin, 5 juin. W. T. B. — Près de Lenen et de Schrunder, à l'est de Libau, des divisions russes ont été mises en faite par notre cavalerie. A l'ouest de Curschany et près de Sarodniczy une attaque russe n'a pas réussi. En Galicie nos troupes ont atteint, après divers combats, à l'est et au nord-est de Przemysl, la ligne Bolestraczys-Torci-Ponziac-Starnowa.Le butin de Przemysl n'est pas encore fixé. Avant l'assaut de Przemysl, les Russes avaient préparé une contre-attaque générale sur tout le front de l'armée Mackensen. Cette offensive a échoué dès le commencement. Des troupes allemandes assaillèrenl des deux côtés les hauteurs de Myslatycze à 22 Km. à l'est de Przemysl. L'armée Linsingen est sur le point de passer la rivière au nord-est de Stryj. Bulletin officiel autrichien Vienne, 3 juin. — Des troupes allemandes ont pris d'assaut cette nuit les dernières positions russes au front septentrional de Przemysl et pénétrèrent aujourd'hui à 3 h. 30 min. du matin, de la direction du Nord, dans la ville. Notre 10' corps y a pénétré de l'Ouest et du Sud; ses premiers détachements atteignirent la place principale de la ville peu après 6 heures du matin. On ne peut pas encore se faire une idée de la portée de ce succès. L'attaque des troupes coalisées dans la région au Nord de Stryj progresse toujours effi cacement. Résultat actuel de la bataille près de Stryj : Prisonniers : 60 officiers, 12,175 hommes; butin : 14 canons, 35 mitrailleuses. Sur le front italo-autrichien Communiqué officiel autrichien Les Italiens continuent le bombardement inefficace de nos fortifications sur plusieuts points de la frontière du Tyrol et de la Carin-thie. Un neutre sur la guerre en Galicie Christiania, 2 juin. — Un collaborateur militaire du « Morgenbladets » écrit : D'une importance plus haute pour le cours des événements en Galicie que la reprise de Przemysl est l'occupation de Stryl, formant le nœud de cinq lignes de chemins de fer et de grandes routes vers Lemberg, ce qui mettra les alliés dans la possibilité d'amener en peu de temps des forces supérieures sur les points où ils se proposent de livrer la bataille décisive. Les Russes se retireront probablement sans offrir résistance sérieuse derrière la Dniester, de sorte que la prochaine bataille aura lieu entre le San et la Dniester. L'issue de cette rencontre n'aura pas seulement la plus grande influence sur la guerre en Galicie et en Russie, mais aussi sur tous les théâtres de la guerre ». En mer Londres, 2 juin (Reuter). — Le vapeur anglais Saidich, appartenant à la Khedivial-Mail-Com-pany et jaugeant 3.303 tonnes, a été torpillé dans la mer du Nord. Le vapeur était en route d'Alexandrie vers Hull. Sept hommes de l'équipage ainsi qu'une stewardness ont péri; les autres voyageurs ont pu être sauvés. # # Londres, 3 juin.— La barque russe Montrosa a heurté une mine et coulé dans la mer du Nord à 25 milles de Spurnhead. L'équipage a été sauvé. Londres, 3 juin. — Le toueur à vapeur Condor a heurté une mine et a coulé avec son équipage à la hauteur de Scarborough. En Angleterre Les changements ministériels Les nominations aux postes secondaires dans le nouveau Cabinet anglais sont'à peu près terminées.De la longue liste publiée le 31 mai par les journaux, il résulte que 16 membres de l'ancien Cabinet se sont retirés ou ont changé de fonctions. Il vient d'être décidé que Lord Robert Cecil remplacera M. Neil Primerose au sous-secrétariat d'Etat du Foreign Office. M. Brace, membre du Parti ouvrier, a été nommé sous-secrétaire d'Etat au ministère de l'intérieur et M. Addison sous-secrétaire d'Etat au ministère pour les munitions. Les Zeppelins à Londres Londres, 1 juin.— L Amirauté anglaise communique que les Zeppelins ont jeté 90 bombes, la plupart incendiaires, sur l'agglomération de Londres. De nombreux incendies se sont déclarés; pour trois seulement il fallut requérir les pompiers, qui réussirent d'ailleurs à les éteindre rapidement. Aucun monument public ne fut endommagé. Au Mexiaue New-York, 31 mai. — Le bruit court que le Mexique est disposé à accepter une intervention américaine pour arriver à rétablir une situation normale dans le pays. # Washington, l"r juin (Reuter). — Dans un appel de la Croix-Rouge en faveur du Mexique, il est déclaré que la famine règne dans la république; la population de la ville de Mexico se trouve dans le danger de mourir de faim. La famine a éclaté à Acapulce. Des femmes et des enfants ont été piétines et tués lors de la distribution des vivres. On croit que le Président Wilson compte adresser une note aux leaders des Dartis oui éauivaudra à un ultimatum A Bruxelles Le Comité central de la Chambre de commerce de Bruxelles s'est iréuni lundi après-midi au Palais de la Bourse, sous la présidence de M. Van Elewyck. Réunion fort nombreuse, au cours de laquelle des questions de la plus hau.e importance ont été discutées. C'est la question du moratorium qui a d'abord été soulevée. On sait que l'autorité allemande projette de lever le moratorium, en ajoutant qu'il serait question de recuier de onze mois les dates d'échéance des effets de commerce pour toutes les villes où il existe une agence de la Banque Nationale de Belgique et de douze mois pour les autres localités. Des membres de la Chambre de commerce ont préconisé une prolongation du moratorium. De nouvelles démarches seront tentées dans ce sens. Les conditions de la reprise du travail ont ensuite donné lieu à un intéressant débat. On a émis à l'unanimitié l'opinion qu'une reprise du travail dépend essentiellement de meilleurs moyens de communication, de l'approvisionnement en matières premières, du tarif des transports des voyageurs et marchandises, du service postal, etc. Afin d'occuper des millions de cerveaux de la classe ouvrière, des membres ont suggéré de développer l'enseignement professionnel et d'obliger, notamment, les chômeurs secourus à assister une ou deux heures par jour à un cours quelconque. On pourrait, par exemple, faire dépendre l'octroi des secours de la fréquentation régulière de certains cours professionnels. Enfin, des membres ont demandé qu'on rappelât à l'administration « surannée- » des Vicinaux le but que le législateur a poursuivi en créant cet organisme ; mettre notamment tous les villages en communication avec le réseau national des chemins de fer. Incidemment, des membres ont montré quel grave inconvénient il y avait à confier l'exploitation des chemins ae fer à une seule administration, celle de l'Etat. 11 est évident, a-t-on fait remarquer, que si les chemins de fer avaient été concédés à diverses compagnies, " nous n'en serions pas où nous sommes ». En conséquence, le vœu a été formulé de voir les chemins de fer concédés à des sociétés privées agréées par l'Etat. A Malines Les 500 ouvriers expérimentés ne s'éïant pas présentés à l'arsenal de Malines, les m; sures coërcitives annoncées par avis du gouve-nement général ont été mises en vigueur le 3 juin, à 6 h. (H. A.) du matin. Ces mesures impliquent, nous l'avons dit, la suspension du trafic économique pour Malines et les environs. Nécrologie — On annonce le décès à La Haye de M. Fr. Rosseels, ancien conseiller provincial progressiste du canton d'Anvers et membre du Conseil général de la Fédération progressiste. Feuilleton du Journal de Gand 14 Le Comte !.. DE_ MONTE-CRISTO PAR ALEXANDRE DUMAS — J'assistais au repas de mes propres fiançailles, Monsieur, dit Dantès d'une voix légèrement émue, tant le contraste était douloureux de ces moments de joie avec la lugubre rérémçnie qui s'accomplissait, tant le visage sombre de M. de Villefort faisait briller de Wute sa lumière la rayonnante figure de Mer-eédès.— Vous assistiez au repas de vos fiançail-les? dit le substitut en tressaillant malgré lui. — Oui, Monsieur, je suis sur le point d'é-pouser une femme que j'aime depuis trois ans. Villefort, tout impassible qu'il était d'ordi-"aire, fut cependant frappé de cete coïnciden-ce. et cette voix émue de Dantès surpris au milieu de son bonheur alla éveiller une fibre sympathique au fond de son âme : lui aussi se ■Variait, lui aussi était heureux, et on venait 'roubler son bonheur pour qu'il contribuât à detruire la joie d'un homme qui, comme lui, touchait déjà au bonheur. Ce rapprochement philosophique, pensa-t-il, fera grand effet à mon retour dans le salon de M. de Saint-Méran; et il arrangea d'avance dans son esprit, et pendant que Dantès attendait de nouvelles questions, les mots antithe ques à l'aide desquels les orateurs construisent ces phrases ambitieuses d'applaudisements, qui parfois font croire à une véritable éloquence.Lorsque son petit « speech » intérieur fut arrangé, Villefort sourit à son effet, et revenant à Dantès ; — Continuez, Monsieur dit-il. — Que voulez-vous que je continue? — D'éclairer la justice. \ — Que la justice me dise sur quel point elle veut être éclairée, et je lui dirai tout ce que je sais; seulement, ajouta-t-il à son tour avec un sourire, je la préviens que je ne sais pas grand'chose. — Avez-vous servi sous l'usurpateur? — J'allais être incorporé dans la marine militaire lorsqu'il est tombé. ■— On dit vos opinions politiques exagérées, dit Villefort, à qui l'on n'avait pas soufflé un mot de cela, mais qui n'était pas fâché de poser la demande comme on pose une accusation.— Mes opinions politiques, à moi, Mon sieur? hélas! c'est presque honteux à dire, mais je n'ai jamais eu ce qu'on appelle une opinion : j'ai dix-neuf ans à peine, comme j'ai eu l'honneur de vous le dire; je ne sais rien, je ne suis destiné à jouer aucun rôle ;>le peu que je suis et que je serai, si l'on m'accorde la place que j'ambitionne, c'est à M. Morrel que je le devrai. Aussi, toutes mes opinions, je ne dirai pas politiques, mais privées, se bornent-elles à ces trois sentiments: j'aime mon père, je respecte M. Morrèl et j'adore Mercé-dès. Voilà, Monsieur, tout ce que je puis dire à la justice; vous voyez que c'est peu intéressant pour elle. A mesure que Dantès parlait, Villefort regardait son visage à la fois si doux et si ouvert, et se sentait revenir à la mémoire les paroles de Renée, qui, sans le connaître, lui avait demandé son indulgence pour '» n-évenu.Avec l'habitude qu'avait déjà le substitut du crime et des criminels, il voyait, à chaque parole de Dantès, surgir la preuve de son innocence. En cet enfant, simple, naturel, éloquent de cette éloquence du coeur qu'on ne trouve jamais quand on la cherche, plein d'affection pour tous, parce qu'il était heureux, et que le bonheur rend bons les méchants eux-mêmes, versait jusque sur son juge la douce affabilité qui débordait de son cœur. Edmond n'avait dans le regard, dans la voix, dans le geste; tout rude et tout sévère qu'avait été Villefort envers lui, que caresses et bonté pour celui qui l'interrogeait.— Pardieu, se dit Villefort, voici un charmant garçon, et je n'aurai pas grand'peine, je l'espère, à me faire bien venir de Renée en accomplissant la première recommandation qu'elle m'a faite ,cela me vaudra un bon serrement de main devant tout le monde et un charmant baiser dans un coin. Et à cette douce espérance la figure de Villefort s'épanouit; de sorte que, lorsqu'il reporta ses regards de sa pensée à Dantès, Dantès qui avait suivi tous les ' mouvements de physionomie de son juge, souriait comme sa pensée.— Monsieur, dit Villefort, vous connaissez-vous quelques ennemis? -— Des ennemis à moi. dit Dantès : j'ai le bonheur d'être trop peu de chose pour que ma position m'en ait fait. Quant à mon caractère, un peu vif peut-être, j'ai toujours essayé de l'adoucir envers mes subordonnés. J'ai dix ou douze matelots sous mes ordres : qu'on les interroge, Monsieur, et ils vous diront qu'ils m'aiment et me respectent, non pas comme un père, je suis trop jeune pour cela, mais comme un frère aîné. — Mais, à défaut d'ennemis, peut-être avez-vous des jaloux ; vous allez être nommé capitaine à dix-neuf ans, ce qui est un poste élevé dans votre étàt; vous allez épouser une j jolie femme qui vous aime, ce qui est un bonheur rare dans tous les états de la terre; ces deux préférences du destin ont pu vous faire des envieux. — Oui, vous avez raison. Vous devez mieux connaître les hommes que moi, et c'est possible; mais si ces envieux devaient être parmi mes amis, je vous avoue que j'aime mieux ne pas les connaître pour ne point être forcé de les haïr. — Vous avez tort, Monsieur. Il faut tou jours autant que possible voir clair autour de soi; et, en vérité, vous me paraissez un si di- jeune homme, que je vais m'écarter pour vous des règles ordinaires de 1» »• vous aider à faire jaillir la lumière en vous communiquant la dénonciation qui vous amène devant moi ; voici le papier accusateur; reconnaissez-vous l'écriture? Et Villefort tira la lettre de sa poche et 1 présenta à Dantès. Dantès regarda et lut. Un nuage passa sur son front, et il dit ■ — Non, Monsieur, je ne connais pas cette écriture; elle est déguisée, et cependant elle est d'une forme assez franche. En tous cas, c'est une main habile qui l'a tracée. Je suis bien heureux, ajouta-t-il en regardant avec reconnaissance Villefort, d'avoir affaire à un homme tel que vous, car en effet mon envieux est un véritable ennemi. (A suivre J.

Over deze tekst

Onderstaande tekst is geautomatiseerd gemaakt met OCR (Optical Character Recognition). Deze techniek levert geen 100% correct resultaat op. Dit komt mede doordat oude drukken moeilijker te lezen zijn met software dan moderne. Dat betekent dat er onjuiste tekens in de tekst kunnen voorkomen. Er wordt gewerkt aan verbetering van de OCR software. 

Er is geen OCR tekst voor deze krant.
This item is a publication of the title Journal de Gand: politique, industriel, commercial et littéraire belonging to the category Liberale pers, published in Gand from 1856 to 1923.

Bekijk alle items in deze reeks >>

Add to collection

Location

Subjects

Periods