Journal de Gand: politique, industriel, commercial et littéraire

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16 December 1918
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s.n. 1918, 16 December. Journal de Gand: politique, industriel, commercial et littéraire. Seen on 29 March 2024, on https://nieuwsvandegrooteoorlog.hetarchief.be/en/pid/fq9q23sp59/
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Lundi 10 décembre MM 8 iO centimes le numéro (V2me année N 349 JOURNAL DE GAND ECHO DES FLANDRES ABONNEMENTS : DEUX FRANCS PAR MOIS RÉDACTION & ADMINISTRATION : GAND — 3, RUE DE FLANDRE, 3 — GAND Annonces fr. 0,80 la ligne. Réclamés (avant les annonces) 1 ir. la ligne. Réclames en Chronique gantoise ou dans le corps du journal 2 tr. la ligne. Informations financières et Réparations judiciaires 2 fr. la ligne. — On traite à forfait pour les annonces souvent répétées. Un Document rétrospectif J'accuse M. Caillaux !... C'est sous ce titre suggestif — pendant du fameux « J'accuse » de Zola — que Gustave Hervé attaqua la politique cauteleuse de M. Caillaux. Un ami revenant du front nous a apporté le n* de La Victoire datant du 24 nov 1917, qui publie en article de fond le réquisitoire violent contre ce financier d'envergure, mais que le choix des moyens louches ne rebutait pas. M. Caillaux, doué d'une ambition intarissable, avait sinon allumé, tout au moins vivifié le mouvement défaitiste en France, mouvement ayant pour but une « paix d'entente >• — verstândigungstriede — à laquelle les Allemands aspiraient. Ce mouvement avait gagné même quelque terrain en Belgique, où ses partisans — personnes suspectes pour la plupart — qualifiaient de « jusqu'au-boutiste » la majorité restée fidèle à l'idée que la Bochie devait être battue. Ils cachaient mal sous ce masque d'humanité le but de leurs aspirations : la Belgique, à ce moment occupée, eut dû céder aux exigences allemandes et eut été morcelée. Une Flandre... libre serait née ! Ainsi M. Caillaux travaillait en même temps à l'humiliation de la France et à la destruction de la nationalité belge. S'il était parvenu à entraîner dans son sillage néfaste sa patrie dupée, il eût été l'artisan de la Paix — paix factice du reste — et comme tel hissé temporairement sur le pavois. C'est tout ce que son âme ambitieuse demandait. La France devenait sa proie. Mais, si La Fontaine existait, il écrirait une fable racontant la rencontre du « renard » et du « Tigre ». Les tribunaux jugeront sous peu qui des deux eut raison : l'humanité, elle, a déjà prononcé son verdict ! Nous faisons suivre ici le texte intégral de ce document véhément, précis et fier : Monsieur, j'ai lu votre longue lettre d'hier avec attention et avec bonne foi. Je l'ai lue sans parti-pris contre vous. Je ne suis pas de vos ennemis personnels, ni de vos adversaires politiques J'ai même !u une très vive sympathie pour vous dans les derniers mois qui ont précédé la guerre, parce que je vous croyais victime d'une injustice et parce que vous étiez d'une belle crânerie dans le malheur. Et je vous l'ai témoignée publiquement dans mon journal, une fière et libre tribune où l'on ne craint pas de heurter l'opinion de la foule Je vous ai renouvelé le témoignage public de ma sympathie lors des incidents de Vichy. Loin d'être de vos adversaires politiques, j'étais devenu, dans les deux ans qui ont précédé la guerre, en toute indépendance, de vos partisans. J'étais avec vous pour les deux ans contre les trois ans ; et je crois encore, après l'expérience de cette guerre, que c'est nous qui étions le plus près de la vérité. J'étais avec vous avant la guerre pour un rapprochement franco-allemand. J'ai approuvé, toutes réserves faites sur les dessous diplomatiques et financiers que je ne connais pas, votre règlement amiable de la question du Maroc par l'abadon d'un morceau de notre Congo ; et je me glorifie, avec presque tout le parti radical, avec tout le parti socialiste, d'avoir tout fait alors pour essayer d'empêcher la grande catastrophe, d'avoir même été plus loin que vous, puisque, pour empêcher la guerre, j'ai eu la naïveté pendant plusieurs années, entre les années iy05 et 1911. de proposer aux socialistes allemands de faire parallèlement avec nous une grève générale et une insurrection en cas de mobilisation. Je ne suis point de vos adversaires politiques ou plutôt je n'étais point de vos adversaires politiques : je le suis aujourd'hui. Je le suis depuis que j'ai acquis la conviction morale, non point certes que vous êtes un traître, au sens strict du mot, puisque je reste persuadé que vous aimez la France à votre manière, mais que vous êtes l'âme, l'espoir de tous les défaitistes français, de tous ces malheureux qui, désespérant de vaincre l'Allemagne impériale, sont prêts à accepter du kaiser une paix sans vainqueur ni vaincu, qui serait le déshonneur et la ruine de notre pays. Contrairement à vos dénégations d'hier, j'atfirme que vous êtes le centre de toute la campagne défaitiste. Je vous accuse non pas d'être actuellement le patron occulte du journal que dirige M. Vidal dont le témoignage ne saurait compter puisque ce n'est pas lui quia menté le Pays à l'origine, mais d'avoir été le grand patron occulte du Pays, tant que M. Dubariy, son fondateur, votre homme de paille, en a été le directeur. Je vous accuse d'avoir non point rencontré au hasard des relations mondaines, l'escroc Cavallini, mais d'avoir fait votre compagnie habituelle lors de votre voyage en Italie de tout ce qu'il y a dans ce pays de défaitistes j et de' neutralistes avérés, notamment de Scarfoglio, le directeur du Mattino de Na-ples, et de Cavallini, aujourd'hui arrêté à Rome pour crime de haute trahison. Je vous accuse non pas d'avoir connu Bolo, comme le premier venu peut l'avoir cennu, au hasard des relations mondaines, mais d'avoir été son ami dévoué et son protecteur infatigable.Je vous accuse enfin, non pas d'avoir, pour défendre votre honneur, subventionné Alme-reyda de mai à juillet 1914, mais d'avoir été jusqu'à sa mort son mauvais génie, de l'avoir guidé et encouragé dans les voies du défaitisme et de l'avoir ainsi conduit là où il a fini. Vous avez dit, monsieur, que lorsque vous ■ trouveriez devant vous un homme qui sorti-| rait contre vous autre chose que des insinuations et des ragots, et qui oserait vous accu-! ser en face, vous le traduiriez en Cour d'as-| sises comme diffamateur. Je suis votre homme, monsieur. Allons tirer votre affaire au clair en Cour d'assises. Poursuivez-moi devant le jury national, devant lequel j'apporterai mes preuves, et je ' ferai citer mes témoios. Pour être sûr que l'affaire soit jugée par un jury républicain, je m'engage d'avance à ne récuser personne, pendant qu'usant de vôtre droit de récusation, vous récuserez les douze jurés qui vous paraîtront suspects de passions réactionnaires. Il faut vider l'abcès à fond. C'est un service à rendre à la nation, dont toutes ces histoires finiraient par détraquer les nerfs. Puisque ma vue pitoyable m'empêche de servir la France envahie les armes à la main, ce sera ma façon de lui témoigner mon amour. Monsieur Joseph Caillaux, je vous somme de me poursuivre en Cour d'assises. Gustave Hervé. I C'est mu par la loi inébranlable que le principe de Justice 'levait, vaincre finalement et à jamais celui de Force, que Gustave Hervé changea le titre de son journal en celui de La Victoire.- Les événements nous ont prouvé qu'il avait raison ! Echos du palais 15 décembre. Question épineuse I iviaintenant que les » activistes » — en ! nombre chaque jour plus considérable — ont ! été placés sous mandat d'arrêt, et écroués à la Nouvelle Promenade, en attendant leur comparution en justice ; qu'ils sont, suivant l'expression consacrée, menacés dans leurs personnes et dan« leurs biens, se pose, poulies membres du barreau, une question des plus délicates et, par le fait même, des plus controversées : doivent-ils prêter leur concours à ceux qui feraient appel à leur assistance. Il faut évidemment partir de ce point de vue, que les u activistes » s'adresseraient sans doute à des adversaires de leurs théories et i de leurs idées, — et ce d'autant plus inéluc- j tablement que ceux qui, parmi les avocats, : partageaient leur manière de voir, ont cessé d'être à Gand. et bientôt sans doute au tableau de l'Ordre. . Et voici les opinions diverses. D'aucuns — qui paraissent être les moins nombreux — prétendent, qu'il faut mettre en quelque sorte les traîtres hors la loi, les traiter en « out-laws », se désintéresser d'eux, leur refuser toute assistance, les abandonner au sort qu'ils ont volontairement choisi, et au châtiment qu'ils méritent. Comment, disent-ils, les bons patriotes que la quasi-unanimité des avocats ont été et sont demeurés au i milieu de toutes les turpitudes commises pourraient-ils trouver des justifications et des i excuses pour des crimes abominables? Que j pourraient-ils bien soutenir ou quels aigu- , i ments invoquer en faveur de ceux qui ont ; failli à leur devoir le plus sacré ? Quelle con- j ! vict.ion pourraient-ils apporter à la. défense i ! d'une cause indéfendable en çoi ? Et leur J conscience ne se révolterait-elle pas s'il leur fallait couvrir de leur antorité pareilles infa-; mies ; l'opinion publique ne s'indignerait-elle ! pas si leur talent était mis à la disposition I d'un aussi mauvais procès ? Sophismes, que tout cela, répondent les ; autres? Le droit de la défense n'est-il pas sacré ? Faut-il abandonnera eux-mêmes,fut-ce les plus grands coupables,et à côtéde ceux-ci la grande masse des dévoj'és, des comparus de second ordre ? Ne voit-on chaque jour les plus odieux criminels, à l'heure de leur comparution en justice, être assistés de maîtres du barreau, qui déploient en leur faveur, sans compter, les trésors de leur éloquence ? N'y aura-t-il pas certaines excuses ou circon-| stances atténuantes à faire valoir — du moins 1 pour certains d'entr' eux ? Faut-il les abandonner sans secours à la vindicte publique ? Les exposer à un châtiment impitoyable sans qu'une voix quelconque se soit élevée en leur faveur? Ne faut-il pas craindre un emballement inconsidéré, 1111 châtiment qui dépasserait la mesure ? Et abandonnés à eux-mêmes, désemparés par l'appareil judiciaire, inexpérimentés en ces matières du droit, les criminels politiques 11e ressembleraient-ils à ces pauvres loques humaines, épaves sociales, vers qui se tend toujours une main accusable? j N'ont-ils pas des femmes et des enfants, innocentes victimes de leur crimes, dont il faut aussi se souvenir ? Va-t-on les exposer, ces derniers,à la misère et à la ruine,les englober dans la réprobation qui frappe les chefs de famille ? Et le rôle, si beau, si noble, si sublime — quand il est bien compris de l'avocat, va-t-il devenir lettre morte? Il en est, parmi les cliers maîtres, qui sont partisans d'une solution qui semble tenir compte de.toutes les opinions et sauvegarder tous les intérêts in medio virtus ! Ils professent cette opinion qu'en principe, l'avocat sollicité par un activiste de lui prêter son ministère, s'y refusera; tous les avocats se montreraient d'accord sur ce point, et n'accepteraient pas volontairement, de défendre ceux qui ont trahi leur patrie. Mais ceux-ci auraient un recours : ils s'adresseraient au bâtonnier et au conseil de l'ordre, lesquels d'office et en commençant sans doute par eux-mêmes —, désigneraient des défenseurs aux accusés. C'est ce moyen que préconise d'ailleurs le Code d'in traction criminelle quand il impose au président de la Cour d'assises la désignation d'un défenseur d'office aux accusés qui n'ont pu ou voulu pourvoir eux-mêmes au soin de leur défense et faire choix d'un conseil. Cette assistance serait évidemment gratuite. Nous ne voulons préjuger de la solution qui interviendra, nous bornant à reproduire les opinions qui ont été exprimées, et convaincu d'ailleurs qu'en cette circonstance comme en toute antre, le barreau saura être à la hauteur de sa mission sociale, s'inspirer des principes et des traditions qui ont fait, en tous temps, sa noblesse, sa grandeur et aussi sa force. X.X. Bibliographie L'Adjudant Benoit, roman par Marcel Prévost, éditeur Alphonse Lemerre. C'est une œuvre maîtresse, abondante de réalité, palpitante de vie, émouvante au premier chef. L'adjudant Benoît Castain a été chargé, en _août 1914, d'établir un poste de télégraphie sans fil dans le château d'Uffigny, près de la frontière de l'est. Ce château appartient à des étrangers, que l'on croit Polonais, et est gardé par lin modeste intendant. Joze Archer, qui, en sa qualité d'ancien militaire de 70, jouit de la sympathie et de la confiance des villageois. Les Polonais et Archer lui-même sont, en îéalité, des Boches déguisés. A peine Benoît est-il installé au château qu'il est blessé dans une rencontre avec des uhlans, et cela plusieurs jours avant la déclaration de guerre. Là, comme en bien d'autres points des marches françaises, les cavaliers prussiens ont tenté d'opérer un coup de main par surprise, un véritable coup de main de bandits. Les ambulances n'étant pas encore organisées, Benoît est soigné dans le pavillon de Joze Archer, par la fille même de celui-ci. l'accorte Gertrude. Les jeunes gens apprennent à s'aimer et se fiancent. Dans l'inteivalle, la guerre a éclaté, on se bat non loin d'Uffigny. L'adjudant reprend son service et presque aussitôt il découvre que le vieil Archer est un espion au service de l'Allemagne; Benoît tue le père de sa fiancée, et acquiert en même temps la certitude de l'innocence de celle-ci. Le lendemain, Gertrude se donne à lui, tandis que la bataille approche, que le village et le fort voisin sont menacés. Benoît tente ert vain d'éloigner la jeune fille; celle ci demeure aux côtés de l'adjudant et tombe mortellement atteinte par le choc d'une explosion. Elle expire dans les bras de son amant en le suppliant de confier à son père le secret de leurs épousailles. Ce récit est conté par l'auteur avec une simplicité, une précision, une vérité admirables. Point d'ornement supeiflu, point de '• littérature », mais une observation aiguë, une émotion concentrée, une grande élévation de pensée et de style, un large souffle de patriotisme et d'humanité Ajoutez-y l'intérêt du détail historique, l'évocation «les heures douloureuses de 1914 pendant lesquelles l'héroïsme gaulois luttait désespérément contre la traîtrise et la brutalité teutonnes. Ajoutez-y encore l'attrait d'une langue forte,nerveuse, essentiellement française, et telle qu'il ne nous fut plus donné d'en rencontrer depuis quatre ans. C'est plus qu'il n'en faut pour faire de « l'Adjudant Benoît » l'un des ouvrages les plus attachants de la littérature com-temporaine. La levée de 1919 Le gouvernement a déposé, annonce-t-on, un projet de loi de recrutement pour la levée de 1919 exclusivement. Ce projet a pour but de lever, le plus vite possible une nouvelle armée, afin de pouvoir renvoyer dans leurs loyers les soldats qui ont combattu. Cette armée serait formée de jeunes gens appartenant parleur âge aux levées de 1914 à 1915 qui n'ont pas encore fourni de prestation militaire. Ce projet exempte définitivement du service: Ceux dont le père ou deux frères ont été tués à l'ennemi, sont décédés des suites de leurs blessures, sont portés disparus depuis six mois ou ont sacrifié leur vie pour la patrie, pendant l'occupation. Ceux dont trois frères servent ou ont servi pendant la campagne, soit dans l'armée belge, : soit dans une des armées alliées. Ceux qui ont été faits prisonniers par l'ennemi en cherchant à passer la frontière ' pour prendre du service dans l'armée et qui, de ce chef, ont été privés de leur liberté pendant six mois au moins. Si plusieurs fils d'une même famille sont appelés à concourrir à la formation de la levée spéciale de 1919 les désignations éventuelles sont limitées au , nombre de trois, y compris le service en voie d'accomplissement ou déjà accompli pendant , la campagne. Dans ce cas, les exemptions , sont accordées aux mariés d'abord, puis à ; ceux qui, par leur âge, appartiennent aux classes les plus anciennes. L'exemption pour une année accordée par l'article 16 des lois de milice coordonnées aux , membres d'une communauté religieuse, aux étudiants en théologie, aux élèves des écoles normales et aux aspirants instituteurs est , supprimée. Mais les jeunes gens dont-il s'agit ne seront appelés sous les drapeaux pour être . employés à des offices humanitaires, utiles à l'armée, que si les nécessités du service militaire l'exigent. L'exemption temporaire est maintenue poulies aspirants officiers de marine, les jeunes gens qui se consacrent au service de la colonie et les veufs avec enfants. D'autre part, le projet supprime l'exemption du chef de pourvoyance (soutien de famille). On a constaté que ces soutiens lie famille l sont une charge pour leurs familles, plutôt , qu'un appui. Petites nouvelles — un aement la nouvelle d après laquelle Lansing aurait déclaré que l'Allemagne ne serait ravitaillée, avant l'élection d'ijne assemblée constituante. Feuilleton du Journal de Gand. 2Î La Mère Patrie ROMAN PAR MAURICE MONTÉGUT Je l'ai dit, je le répète : malgré vos portes closes, vos palissades, vos barricades, je m'en irai d'ici, mon fils entre les bras, je le rapporterai à sa vraie famille. Et, je ne suis pas inquiète, plus tard, il me donnera raison. 11 sera Français, rien que Français! Je lui ai passé assez de mon âme pour qu'il n'y mente pas. D'abord Herbert écoutait, en silence. Il ne pouvait s'empêcher d'admirer cette superbe vocifératrice dans ses imprécations. Cette femme, dressée contre lui, il l'aimait encore, — comme il l'avait toujours aimée ; passion surtout de chair, désir renouvelé de loup frôlant la louve, appétit constant de volupté naturel à des géants sauvages, grandis chastes dans les solitudes,n'ayant connu la femme que la nuit de leurs noces. Et, à la pensée que ce corps toujours eon-voitô, eet instrument nécessaire de ses joies | ; nocturnes pourrait lui échapper, il avait le j vertige, devenait fou autant de regret que de | colère, et ne savait plus s'il allait se jeter sur elle pour la battre ou lui fermer la bouche ! dans la morsure d'un baiser. Il vacillait, tiré par deux courants contraires, les poings serrés, mais la .chair mémo-rante; ne savait plus ce qu'il voulait vrai-j ment. Mais, autour de lui, les voix hargneuses de ses frères sifflaient de sinistres encouragements aux gestes irrémédiables. — Tu l'entends ? elle te brave, elle te méprise ! — Si elle t' avait mieux connu, jamais elle n'aurait voulu de toi ! — C'est une grâce qu'elle t'a faite en t'épousant. beau sire; car tu n'es qu'un manant, quelque chose de vil qu'on repousse du pied. Alors, il pâlissait rougissait tour à tour, et comme la pente humaine est plus glissante du côté du mal que du côté du bien, il roulait aux frénésies dernières, perdait toute raison ; et, brisant les entraves de son ancien amour, redevenait la brute aveugle qu'il était bien au fond. — Tais-toi! Te tairas-tu? Ah! prends garde!... Vers midi, dans un duel semblable, il levait : les deux poings sur la tête de Clorinde. Elle ' vit venir le coup, ne baissa pas le front, ne | rompit point d'un pas. Alors, hébété, les bras retombés plus lourds le long de son grand corps tremblant, c'est lui qui recula, les yeux sanglants, la face convulsive, épouvanté d'a-' voir entrevu le meurtre. Et les autres, les marchands de mauvaises querelles, d'abord intéressés, ravis de la tournure que prenait l'entretien, s'écartaient : avec de vilains rires et s'en allaient plus loin maugréer dans les coins. Mais, le soir, la scène recommença ; de part ; et d'autre, de notveau, les invectives volè-■ rent. Eperdue, exaspérée d'entendre à tout | propos salir et les siens et la France, Clorinde 1 criait furieusement : — A bas l'Allemagne! à bas .. Mais la main brutale d'Herbert lui coupait son cri dans la gorge; dans ses cinq doigts de fer, il la tenait râlante. Soudain Eitel, qui cachait sa tête blonde dans les jupes de sa mère, comme un jeune chien fidèle défendit son amour, et planta ses dents pointues dans l'autre main d'Herbert. Il lâcha to«t, hurlant i — Race de vipères ! I Et il secouait en l'air sa gauche ensanglantée. Clorinde dégagée et reprenant le souffle se prit à rire d'un grand rire hystérique qui n'en finissait plus. Mais cette fois, Thècle puisait du courage dans son indignation. Elle se jetait entre ses fils, les repoussait, écartait Herbert : — Vous êtes des sauvages! des êtres indignes! Hermann ! souffriras-tu longtemps?... Clorinde, une femme, ta femme à toi. Herbert; notre fille, à nous ! votre sœur à vous autres. Et vous osez?... Elle a raison de vous maudire; vous l'avez mérité. Charlotte. Christine, entraînaient Eitel et Clorinde, dont le rire sinistre grinçait le long des corridors. Thècle fut écoutée par les hommes. tête basse. L'horreur tragique du drame touchait au paroxysme; et Gottlob lui-même en semblait mal à l'aise. Hermann, accablé, tomba sur une chaise et gémit sourdement : — Nous devenons fous !... Ce n'est pas cela la guerre, puisqu'il nous faut la guerre.. La pauvre Clorinde est logique avec son passé; tout cela ce n'est pas de sa faute... Et vous voici tous à l'accabler! Herbert... de ma vie. je n'ai levé la main sur ta mère... elle était sacrée... — Oui, oui, balbutia le géant, plein de : . remords à présent... bien sûr... Il vaudrait , mieux avoir des hommes devant soi... Oui, | cela vaudrait mieux. Je n'ai plus de femme, ^ je n'ai plus d'enfant!... j — Oui! approuva Gottlob, des hommes! des hommes pour se venger ! Le lendemain, ils furent servis. Mais d'ici l'à, la nuit fut longue et lugubre pom- tous. Christine et Charlotte avaient reparu, la face morne, et l'aînée disait : — Clorinde est enfermée dans sa chambre avec Eitel qui tremble; tu feras bien, Herbert, de les laisser en paix. On te dressera un lit dans ton ancienne chambre... — Je n'ai besoin de rien ni de personne, coupa brutalement le colosse ahuri. It il sortit à son tour, sans savoir où il allait. Charlotte se tourna vers ses autres trères, les considérait bien en face et les interrogeait : — Eh bien! Vous êtes contents ? — Pas tout à fait, répondit Othon, sur un ton équivoque ; mais en ce monde 11 n'y a rien d'absolu ! Dans les pires circonstances, il conservait ses manies dogmatiques. f,\ .<n<vr.j i

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