lre Année N° 9 BUREAUX de la Revue BRUXELLES : Boul. Lambermont, 460 ANVERS : 28, Courte rue Neuve, 28 Abonnements Belgique : un an fr. 25 Étranger, port en plus. Pour les annonces S'adresser au bureau de la Revue. -1 v Revue paraissant le Samedi 1— Directeur : Joseph DE GEYNST. — Secrétaire de la rédaction : Charles TYTGAT Les Annexions Il est certain que de récents incidents ont donné une actualité et une acuité inattendues à ces questions, si "raves, de la rectification des frontières de la Belgique et de l'incorporation éventuelle, au territoire belge, de régions qui assureraient au pays une sécurité et une protection, que les événements internationaux ont démontrée être manifestement insuffisantes.Jusqu'à présent les efforts et la propagande de ceux qu'on dénommait les annexionistes n'avaient guère eu de succès. Si l'opinion publique admettait la possibilité du retour volontaire à la Belgique de certaines bandes de territoire ou de certaines contrées qui lui sont apparentées par la langue, les mœurs ou une longue histoire commune, la quasi-unanimité répugnait à l'idée de s'adjuger de véritables provinces, prélevées sur le domaine d'un autre Etat. Encore pantelants sous l'étreinte de la griffe germanique,nous ne pouvions admettre qu'on nous crût capables d'user, en cas de victoire, si dérisoire fût-elle, des procédés de violence et de conquête dont nous étions toujours les victimes. Mais il faut bien reconnaître que, sous ce point de vue, l'état d'esprit de la Nation s'est grandement modifié. Il n'est pas douteux que cette volte-face, nous ne voulons pas dire qu'elle ne se fût pas produite à la suite de la victoire merveilleuse et complète de l'Entente. Mais, à coup sûr, elle eût été m'oins rapide, moins profonde,, si nos voisins des Pays-Bas n'avaient pas commis une série de maladresses pour ne pas les qualifier autrement, qui leur ont valu une désaffection bien compréhensible des Puissances Alliées. Si même la neutralité persistante de la Hollande pouvait s'expliquer par la nécessité, par la crainte, par la faiblesse militaire de ce pays, toujours est-il qu'il est clairement apparu que cette neutralité ne fut pas d'une suffisante bienveillance à l'égard de la nation voisine et sœur, odieusement égorgée et dépouillée. Les organes les plus importants de la presse néerlandaise ne cachaient pas leurs sympathies germaniques, et l'hospitalité, généreusement accordée par la Hollande à des milliers de nos compatriotes, ne parvenait qu'à atténuer l'impression fâcheuse que causait cette attitude. Malgré tout cependant, un mouvement caractérisé ne se serait pas déclanché. Si le gouvernement hollandais, en ces derniers temps, n'avait, de façon inexplicable, montré vis-à-vis de l'Allemagne une condescendance vraiment excessive.Mais ces incidents ont été l'occasion, sinon la cause, des récriminations et revendications qui se sont fait jour et qu'il va falloir, coûte que coûte, examiner et juger. D'autant plus que la Belgique n'est pas, loin de là, la seule intéressée dans la solution clu problème. Les événements ont démont-ré que toutes les puissances civilisées sont solidaires du sort de la Belgique, dont l'existence et la sécurité demeurent pour elles, d'un prix inestimable. Elles auront donc à intervenir dans le règlement du conflit qui s'ouvre. Elles le feront évidemment, avec le souci de l'équité et de l'humanité qui les caractérise et qui a été, pour plusieurs d'entre elles, la cause dominante de leur intervention dans la -lutte gigantesque qui se termine. Il y aura donc à concilier le principe supérieur du respect des nationalités, avec la nécessité absolue d'empêcher l'éventualité d'agressions nouvelles contre ce principe. Tâche compliquée et formidable qui va s'imposer aux plénipotentiaires du prochain Congrès de la Paix! Dès à présent, l'on peut cependant donner certaines indications.S'il est absolument certain que le principe des nationalités met un obstacle complet à la main-mise brutale d'une puissance supérieure en force sur une autre plus faible, il ne peut cependant être admis que, une fois la carte de l'Europe refaite, à tout jamais la distribution politique et diplomatique sera définitivement établie sans possibilité de modifications ultérieures. Une telle cristallisation est déraisonnable et impossible, car il faut tenir compte des modifications incessantes qui se produisent dans les peuples, tant au point de vue moral, qu'au point de vue ethnique, économique, politique et social. Mais il importe de faire en sorte que l'œuvre qui va s'accomplir ait la durée la plus longue possible, puisque cette œuvre, on va la construire de façon à ce qu'elle assure à l'Europe et au monde une paix durable. Il y aura donc lieu de faire des sacrifices réciproques, sans lesquels surgiraient des mécontentements sourds et des germes de conflit. C'est dans cet ordre d'idées qu'il faudra que la Hollande, peuple essentiellement pratique et qui a montré un tel esprit au cours de cette guerre, envisage la situation et sache prendre des décisions. Il ne sera pas question de lui imposer par la force, une solution quelconque. A cet égard, la guerre abominable qui va se clore, a, nous le pensons fermement, mis fin pour jamais au régime de la terreur et de la violence brutale. Mais il est d'autres moyens de faire entendre raison à ceux qui se montreraient absolument trop récalcitrants clans l'élaboration du programme définitif de paix. Il en est d'ailleurs ainsi dans la vie civile, où le régime de la force et de la contrainte forme l'exception et où les procédés de violence sont punis. Mais, à côté de ces procédés abolis et surannés, subsistent des moyens parfaitement légaux et pacifiques d'amener un co-contractant à se montrer raisonnable.

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