L'étoile belge

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s.n. 1918, 23 Novembre. L'étoile belge. Accès à 28 juin 2024, à https://nieuwsvandegrooteoorlog.hetarchief.be/fr/pid/jd4pk07r4g/
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10 ceaiiLiaaïes le Numéro J 0 centimes 5e Meméro L'APOTHEOSE LA JOURNEE DU Jeudi, c'était la journée de l'armée ; hier ce fut la journée du Roi. Le ltoi a retrouvé son peuple ; le peuple a retrouvé son Koi. Déjà, lorsque rien n'annonçait encore l'effroyable teii. 'ête qun nous avons traversée, la Belgique avait adopté ce souverain, dont la jeunesse pensive et studieuse commandait l'estime et le respect. Déjà on devinait en lui une volonté tenace, une intelligence dirigée vers l'étude des grands problèmes de notre époque d un sentiment naturel et profond du Devoir. Une popularité printnnière entourait le couple royal et l'avenir semblait s'ouvrir prospère et riant devant le berceau des jeunes princes. Mais quand la tourmente imprévue se déchaina, la question se posa de savoir quelle altitude prendrait ce jeune Roi que. l'on aimait sans bien le connaître.Disons — et ce sera son éternel honneur — qu'il ne connut ni un instant de doute, ni un moment d hésitation. Comme son peuple, il cpmprit nue la "Belgique devait, quoi qu'il pût lui en coûter, tenir la parole dornée et rester fidèle à son serment. Le sentiment du devoir atie l'on avait deviné en lui. se manifesta tout de suilp comme il le fallait, avec une simplicité héroïque- Premier citoyen d'une nation qui a le celte de la foi jurée, il répondit à l'agression des barbares par la résistance que nos engagements internationaux nous imposaient. Ceux qui l'ont vu le jour de cette mémorable séance du Parlement, où il releva fièrement h défi teuton, n'ont pas oublié le changement soudain de son jeune visage, le pli volontaire et tragique qui crispait sa bouche, l'inébranlable résolution oui brillait dans son regard. L'ovation '-u'on lui lit. ainsi qu'à la Reine et aux Princes, fut la plus oignante qu'un souverain puisse recueillir. Ce jour-là, il y eut entre le Boi Albert et la Belgique un solennel échange de promesses qui, de part et d'autre, ont été tenues. Dès ce moment, le Roi devint un soldat, le premier soldat de notre armée. Il fut l'ûme de la résistance, le soutien des courages et l'excitateur de loutes les bravoures. Son sentiment du Devoir lui donna la force de résister aux épreuves, aux péripéties malignes de la mauvaise fortune, à tous les coups que le port semblait multiplier sur notre tête. De même qu'il ne douta point, qu'il n'hésita point, il ne désespéra jamais. Il sut communiquer sa foi à son entourage, à son pouvernemenf. à nos légions. Et lorsque, après quatre années de lutte angoissante, il se mit.à la tête de cette armée qui devait reconquérir ■ «<£>■■ ' ■ ■ ■ ■■ les Flandres, une acclamation universelle monta vers le Roi-soldat. La Belgique dit à son souverain : « Sii e, votre destinée est uniqûe ; Roi par droit de naissance et par consentement populaire, vous l'êtes encore par droit de conquête ! Sire, vous êtes Roi deux fois !» La même acclamation qui a salué le Roi Albert a salué la Reine Elisabeth et les enfants royaux. Notre Reine nous est rendue, la santé retrempée par la dureté de l'épreuve pendant laquelle est s'est oubliée elle-même pour être la sœur d : charité de tous. On l'a vue au chevet des blessés, fermant les yeux des morts héroïques, consolant les oarents des soldats tombés. Aussi l'armée, dont elle a été l'ange gardien, lui a voué le culte qu'elle mérite.La foule a mêlé au nom de la Reine les noms du prince Léopold. du prince Charles et de la princesse Marie-José. Les deux princes marcheront dans la voie tracée nar leur père et la nrincesse sera la digne tille de la Reine Elisabeth- _ Tous les trois conserveront le souvenir de cette inoubliable journée, '-ui sera pour eux féconde en exemples et en leçons. Vice le Roi ! Vive la Reine ! Vive la Famille Royale ! DECOR DE FETE Imaginiez, grandie à la dimension d'une ville, urne de ces mosaïques appelées mille-fiori que les Italiens onfed'mteeit dans une boute die verre. Vous aurez l'aspect de Bruxelles s'évoiUaait, par la matinée de ce vendredi 22 novembre, sous un ciel de cristal. Rien au'hre ne peut donner l'idée die ce prodigieux fourmillement de couleurs. Pas un monument, pas une façade, pas une fenêtre, •fût-ce celJe de la plus misérable mansarde, ,qud ne soit pavoisée, ornée, décorée, de soôe, (de coton ou de papier. Partout des brassées i de fleurs, des buissons de drapeaux, des 'bouquets de drapeaux, des rues, des ave-|nues de drapeaux, drapeaux belges niâtes a ceux de nos alliés, bannières françaises, Union Jacks, Slats and Stripeà, font écla-;ter au soleél le rouge, l'or, le blanc, le bleu. Je vert, toutes les couleurs de l'allégresse, de j l'orgueil et de la gloire. A cet le mosaïque colossaûe, qui est un ébkmissement, ajoutez Je mouvement d'un peuple qui s'est levé matin pour courir acclamer s*es héros, la rumeur d'une ville en joie, pleine de fanfares, de musiques et de rires. Au bout des rues flotte une vapeur lumineuse, traversée de lueurs et de rayons. Le temps est splendide. De minute en minute la foule grossit. Pas un être vivant qui n'ait sa rosette ou sa cocarde tricolore : il y en a jusqu'à la têtière des chevaux et au collier des chiens. On ne s'attarde guère aux vitrines, où des négociants ingénieux ont trouvé moyen d'exprimer leur patriotisme par des j groupements inattendus' de produits et de i marchandises que personne ne s'était encore avisé d'employer à des allégories loyalistes : un entrepreneur de pompes funèbres — un successeur, évidemment, de Joviel, marchand de cercueils — a piqué petits drapeaux au milieu de son éta-T:ige. Ne citons que pour mémoire les manifestations où s'est donné carrière la « zwanze » bruxelloise : mannequins à l'effigie du kaiser, vitrines abritant des trésors échappés aux razzias allemandes, bronzes qualifiés artistiques, enivres1, laine, etc. On passe. C'est à peine si le chant des moteurs fait lever les têtes vers les avions — pavoisés aussi — qui évoluent au-dessus de la ville, pareils à. des oiseaux cuivrés de lumière. On presse le pas, on gagne le centre, en cohues épaisses. La Grand'Place, le plus étincelant collier architectural de l'Europe, comme l'appelait Victor Hugo, n'a jamais été plus magnifique. L'art de nos décorateurs a réussi à le surbroder et h l'enrichir encore avec un goût fastueux. Reprenant une Idée pittoresque de M. Cassiers, qui s'en Hait servi pour son affiche de l'Exposition je 1910, ils* ont fait descendre de la tour, o.n haut de laquelle scintille St-Michel, qua tre filsiqui la relient aux tourelles d'angles, et le long desquels d'innombrables banderoles aux couleurs alliées font onduler au vent, en flammes voltigeuses, leur pimpant papillotage. Comme dans les tableaux des vieux ommegancks, des mâts disposés autour de la place sont reliés par des guirlandes de verdure, des housses grenat brodées d'écussons habillent le balcon de l'HOtel de Ville, et les drapeau^ de vieille soie peinte ondulent aux fendras des maisons des corporations, .dont le soleil matinal dore le faîte. En même t^mps, saisissant contraste, sur les ogives gothiques noircies par les siècles, sur la ronflante et redondante façade Louis XIV éclatent dans leur fraîcheur neuve, les teintes brillantes, jeunes comme la victoire, claires comme la joie de cette journée radieuse, des étendards de la Belgique reconquise, et des nations qui ont combattu avec elle et pour elle. Tous les souvenirs du passé, toutes les fiertés du présent, toutes les espérances de l'avenir. Devant la façade historiée de la Maison des ducs de Bourgogne s'érige une haute statue dorée, modelée par le sculpteur Charles Samuel, « La Brabançonne ». Debout, entraînée par le rythme héroïque, brandissant un drapeau déployé, elle chante à pleins poumons le refrain sacré, que l'inscription du socle répète avec elle : « Le Roi, la Loi, la Liberté ! » De place en place ont été ainsi élevés des monuments de circonstance, autour desquels la foule afflue. Derrière la Maison du Roi, sur l'emplacement de la Vieille Boucherie, M. Jacques Marin a imaginé, en hommage à la mémoire de miss Cavell, un dispositif assez original de pleureuses qui font cortège à la martyre. Le? ouvriers n'ont pas terminé d'aménager le soubassement, que déjà on venait y déposer une gerbe de fleurs... A l'intérieur du Parc, face à la rue du Parchemin, un piedestal de granit poli, avec cette inscription : « Yser — A nos héros », supporte deux figures nues précipitées en une course haletante, et tenant au bout de leurs bras tendus des couronnes qu'elles auront l'air de jeter en offrande à l'armée victorieuse qui défilera, tout à l'heure devant elles. Cette composition animée, très étudiée, est l'œuvre de M. Phil. Wolfers, qui en a fait don à la ville, pour célébrer l'heureux retour de son fils après quatre ans et demi de campagne. M. Jules Lagae, qui avait deux fils h la guerre, ne verra, hélas, pas revenir l'aîné. Quand il a été frappé de ce deuil, dont il ne se console pas, l'artiste venait d'achever le mémorial qui s'élève entre la grille du Parc et le Palais. A mi-hauteur du socle, sur lequel il se détache en ronde-bosse, un lion fièrement modelé, passe en grondant, foulant un vautour égorgé. Le monument se complète par un piédestal orné d'attributs guerriers, portant l'inscription : « A notre grand Roi, à notre vaillante Armée » et que surmonte le buste royal, semblable, sous sa couronne de laurier, à une effigie d'impérator romain. A l'entrée du Mont des Arts, le statuaire Grandmouïin a donné une allure noble et charmante à l'ange de la Paix. Place Safin!-Jean, on a symboldsé la Paix r une jeune femme drapée, debout, tient un drapeau dont les plis retombent autour de la hampe. Sur la ptace Surlet die Chockier, un grand motif sculptural représente une Belgique casquée qui se dresse contre un flot d'océan apportant un baîtadllon allemand ; comme dwins $e récit classique, le flot recule épouvanté.La grille de ki s la/lue Beliiard est décorée, ses quatre angles, de faisceaux surmontés d'un bouquet de drapelets framçacs retenu par des écusscns au monogramme R. F. Derrière ki statue, dc»3 bannières .rougé, blianc et bleu flottent par-dessus le panorama de la ville, que domine, profilée sur le ciel rose, la tour de l'hôtel de ville, pareille au mât d'un navire géant en grand pavois. Place des Martyrs, la crypte e»st transformée en jardiin funéraire; des parterres de chrysanthèmes s'encadrent de la sombre verdure des cyprès et des sapins. Un immense voiille tricolore part, de la macn de la Belgique debout au sommet du monument, flotte sur lia crinière du lion qui l'accompagne, et, s'enroulant à larges .plis tout autour du socle, laisse à découvert ce mot qui se (V im lir- on lettres de bronze sur le marbre blanc : Patria. Et ce qur!, peut-élire,est plus émouvant encore et plus beau que ce décor de fête, si riche, si éblouissant qu'il soit, c'est la foule enthousiaste et frémissante, les milliiers d'hommes, de femmes et d'enfants qud,portant sur leurs habits de fête les couleurs pour lesquelles tant des nôtres ont donné leur vie, se précipitant à travers les rues, s'entassent sur les estrades, s'accrochent en grappes humaines aux toitures, aux arbres, aux réverbères, pour contempler et acclamer frénétiquement leur roi, leur armée défilant au milieu des étendards, des musâques et des fleuri, leur patrie enfin reconquise. Spectacle auquel, pour rappeler la pompe du triomphe antique, ne manquera que le vaincu — mais tou3 verront en pensée sa silhouette maudite — marchant enchaîné derrière le vainqueur. L'tiommags des quartiers populaires I Si la décoration des rues et des étalages des diverses artères du populaire et populeux quartier de la rue Haute, de la rue Blaes et de toutes les voies qui dévalent Je l'une à l'autre, s'y ramifient et s'y entrecroisent, n'étale pas nux yeur (le luxe — voire le i ' - te de celle qu'on' rencontre aux vitrines et dam'les rues du centre et du bas de la viTe,: elle n'en ; pas moins touchante en sa modestie e<t sa c«indide naïveté. Certes il y a des drapeaux partout, aux fenêtres 1rs plus modestes, aux lucarnes les plus éloquentes..., hi*nbles petits drapeaux d'étoffe quasi Iransna-rente, même de papier, de calicot à bon marché. rr)B:s il y en n inr;<nit cl ce1 qui est parlant, c'est cela qui dit ce qui vibre dans l'âme du peuple, ce qui l'émeut, ce qui la transporte aujourd'hui.Car cri! âme populaire ps.lpite non se lement dans le- plis de ces naïfs drapelets, dans les fleurs de papier qui sont disposées en guirlandes à certaines devantures, mais encore dans certaines inscriptions qui la traduisent et en lesquelles s'eseoient les mots et les idées coutumes et que le langage populaire traduit en phrases laconiques, mais nui dise..' bien le sentiment qui les a dictées.Dans une vitrine cù sont amoncelés des cuivres de toutes sortes, pièces de suspensions à gaz, parties de main-courante, socles de candélabres, cîlands-liers, ustensiles de cuisine, on lit par dft'siw le tas : « A la disposition de nos alliés ! ». Plus loin, à l'entrée d'un local qui s s'est rouvert que depuis le départ des boches, un énorme transparent étale cette annonce : « Grand bal ». A 'a vitrine d'un marchand de comestibles une grande pancarte encadrée d'une large bande aux couleurs belges, on lit : « Meurtrie mais non vaincue ! Vive la Belgique ! ». Et partout : « Vive nos A'iiés! Vive la Belgique! ». D?ins les cabarets, les murs sont ta-de myriades de pctits'drapoaux ; dans les impasses les enfants qui grouil lent sur le sol boueux jouent au soldat et agitent des drapelets. Et la foule, le peuple qui passe est joyeux, il chante, il rit, il acclame les soldats croisés au passage, et les sait du regard avec une sorte de fierté qui ne songe pas à se dissimuler.C'est le prélude de la joie délirante qui s'emparera tout à l'heure de toute cette population lorsqu'elle saura qu'il rentre, qu'il est rentré, celui en lequel s'incarne l'fime de la Nation. tlt cet hommagè plus modeste, plus pauvre, que traduisent ces humbles drapeaux de moindre dimension oue ceux qui flottent dans le bas de la ville, n'en a pas moins son prix par sa modestie même, par sa sincérité. Le quartier des Marolles, puisque c'est de lui qu'il s'agit, vibre incontestablement à l'unisson des autres quartiers de la cité : lui aussi exulte de joie, lui aussi est fier de la Victoire et du bonheur qu'elle rapporte, lui aussi acclame dans son cœur et dans son cerveau notre vaillante armée et son noble cl valeureux chef. A LA PORTE DE FLANDRE Dès 8 heures, la porte die Flandre et ses abords grouillent d'une fuule bruyante et i joyeuse. Toute la populeuse chaussée de Gaad, toute la vieille rue de Flandre — I l'ancienne Casseie, ancêtre des voies de i communication de Bruxelles — ne sont plus i qu'an papillottement de couleurs vives. Le I vent fait frissonner les étoffes aux façades i comme il ém<ewt cm été les feuilles d'une al- j îée de h ai ils arbres; toute ta forêt des drapeaux frémit; on dirait que les pierres pal- ■ pitent et vivent. Jamais plus beau soleil I automnal n'onchania ciel plus chatoyant et < plus bleu; c'est un dais d'éblouissante lu- : mière — et nous ne savons pourquoi le vers ; de Murger nous revient la mémoire : Dieu qui nous souriait à son balcon d'azur,* Une femme du peuple dit : « Le Ro« bu- ( v«Ét bien ce qu'il faisant qUkUïd il nie voulait revenir que vendredi; il attendait lis beau temps... » Une estrade a été construite prés du pont , du Canal, sur le tarritœre de la ville, pour les autorités communales du grand Bruxelles.Des aéroplanes promènent par dessus la foufle jimusée le ronron d'un gros chat... La foule s'accroît de minute en minute; les grenadiers de service commencent à avoir fort à faire; mais ils sont parvenus a con'Uaiir à la guerre des multitudes autrement redoutables; ce n'est pas celle-ci qui les fera céder : prenant utn point d'appui sur leurs fusils, dont la crosse est callée ■entre deux pavés, ils s'areboutent, souriants et pimpants, le dos en boule, les jambes earacinées au sol, tendues par l'effort; dans cette position, ils sont inébranlables ,: ils sont les pilotis que viendra battre inutilement la marée populaire. Ailleurs, dos soldats cyclistes forment un rempart avec leurs bicyclettes, jointes bout ii bout comme des bouclrilers; elles forment un muir contre lequel rien ne prévaudra plus. Sur las trottoirs, c'est la compression au degré suprême; un ramasseraient de corps encastrés les uns dans les autres; on oioi-raii qu'il n'est plus possible'que l'air entre encore dams ces poitrines écrasées contre ces dos, et, cepondant, quand dé no\iveaux venus débouchent par les rues latérales, ils trouvent encore moyen de pénétrer dans ce mur vivant et $3 s'y maintenir. Pas une plainte, pas une r; cràmÉnat'nn; de temps en temps seulement, ça et lù, un des moellons du bloc est écrasé; il s'effondrerait sur le pavé s'il n'était maintenu par tes moellons voisins... On hè!e des ambulanciers de te Croix Rouge, à qui on le passe et qui l'emportent avec les égards qui spot dus à son état précaire...Les minutes passent; Ve cortège est cm retard. On chante, on bat la semelle sur un rythme pressé, dons le' vent frisquet. Nous remontons quelque peu la chaussée de Gand, sillonnée par la garde bourgeoise de Molenfeek; jamais cette institution ne connut pareille discipline; aucun homme n'a manqué aujourd'hui à l'appel... Los trottoirs sont bordés par tes comités des sociétés du faubourg ; le Cercle Grétry joue des «don&jies» bien venues; c'est une profusàon d'étendards, de drapeaux et de cartels, arborant leurs appellations pittoresques en lettre d'or et d'argent : De Zuid Steer, le Dobbel Club, Léopold II Attractions, la Royale Hammonie, la fanfare Oa-der Ons, l'Union dos fanfares de Jolte-Soiftt-Pierrie, la Pédale de l'Ouest, le Progrès, Molenbeek Attractions, le Burgers-lu'ing, tes sociétés de secours mutuels, les patronages... A mesure quo inouïs avançons, la décoration du quartier se fait moins riche, mais non moins profuse ; Ce •sont maintenant des guirlandes de paipier, des drapelets sur des perches, des médaillons historiés par des peintres improvisés, des chapelets d'oriflammes ornaot des arbres dépouillés par l'automne. Place (tes Etangs-Noirs, la foule bée d'admiration devant un général anglais qu'elle assure être le prince de Teck. Mais le bruit d'une lointaine acclamation nous arrive de la porte de Flandre ; nous revenons dare dare à ta tribune devant laquelle des autos descendent les bourgmestres et éclievins du Grand-Bruxelles, la plupart on habit de cérémonie. Les massiers de la vilîe, eai grand uniforme, les précèdent. F.n tête du cortège, qui vient de l'hôtel de ville et a suivi toute la rue de Flandre, roulait une limousine où le bourgmestre avait pris place. On lui a fait une ovation formidable sur tout le parcours. — Si l'on doit surenchérir pour te Roi, nous dit le Cf. de bourgmestre de Wateir-mael, je me demande ce que ce sera... — Et pourtant, l'on renchérira I dit en xant un officier des guides près de nous. On nous montre, dams une auto qui stationne près du pont, le général Léman, fumant fin cigare d'attente sur une banquette. Le général est très entouré, très félicité; il rayonne : pour de teds hommes, une telle heure est une rançon payée en jloire. Tout à coup, la partie de la rue de Flan-ire, proche du oanal, s'émeut d'un grand tumulte ; on court, on s'informe, tandis que continue à s'enfler la houle des cris et des rires : il s'agit... d'un rat qui, poursuivi par un spitz la partie libre de la chaussée file éperdûmtont entre les deux haies da 3poctateurs... La foule se remet de son émotion en chantant la Brabançonne et Vers l'Avenir. Et l'on recommence à attendre avec patience. Le bourgmestre Max, qui a l'oeil il tout, siinquiète de l'ordre de marche des automobiles communales qui prendront la tête du cortège sitôt que le Roi aura été harangué ; le bourgmestre ne peut faire un pas en avant ou en arrière sans être ovationné ; on suit des yeux tes plumes blanches de son bicorne... Cependant, les' arbres du boulevard de l'Entrepôt et du boulevard Barthélémy se soimt couverte de grappes ihum,acnés ; les gouittièrc>3 des toits sont pleines de badauds îiasardàeux, jambes ballantes dans le vide ; on voit, dans des appartements, u-u rang de personnes assises à la fenêtre, uu autre rang debout derrière, un troisième monté sur des chaises, un quatrième sun-des tables... Onze heures. Apparaît soudain à la hauteur de la rue Ransfort un piquet de gendarmes à cheval, haibillés et casqués oe noir dans fa .bigarrure dc.3 façades de la chaussée de Gand. Un cri : « C'est Lui ! » et déjà des » Vive le Roi! » partent fré-massants, irrésistibles. Et voici que, précédé d'un groupe de cavaliers portant le fanion royal, s'avance 1g Roi coiffé du casque de tranchée, en costume de campagne, montant un cheval blanc, harnaché à ses armes ; la Reine chevauche à un mètre derrière lui, ayant à côté d'elle un personnage en 'tenue d'officier dont la présence et le nom intriguent la foule et que l'on apprend bientôt être le jeune prince de Galles. Voici le prince Léopold de Belgique, le prince Charles-Théodore, et la princesse Marie-José, tous trois également à cheval. Le prince Léopold a la mine martiale dans son uniforme de sous-lieutenant d'infanterie ; les cheveux blond doré ondulent sur le front ; il est coiffé de la casquette de campagne ; le prince Charles-Théodor porte le costume sombre d'officier de la marine britannique. Le Roi 1 Le Roi ! Des milliers d'yeux le dévorent ! C'est le général victorieux qui rentre dans sa capitale reconquise ; le chef auréolé, à l'égal d'un héros antique, d'une légende de bravoure, d'héroïsme et de gloire ! C'est le Chef triomphant d'une armée qui s'enorgueillit de l'aimer et de l'admirer; c'est celui qui a conduit à la victoire les bataillons, les régiments, les escadrons, les canons et qui les ramène, encore frémissants des combats, dans une apothéose ! C'est l'incarnation de la Patrie, le symbole des plus éclatants exploits militaires et la personnification des plus hautes vertus civiques ; c'est l'homme qui, depuis cinquante mois, fait l'admiration du monde, celui dont le nom est salué dans toutes1 les capitales comme dans les plus humbles villages, dans les palais comme dans la maison de l'artisan, dans les usines comme su/r le»s champs de bataille, c'est le Roi, c'est notre Roi 1 Sa figure est grave et volontaire ; le masque s'est affermi ; le teint est hâlé ; il promène sur le peuple délirant qui l'acclame un regard assuré ; il commande à son émotion comme il sied à un chef ; et l'on /jent quo ce qu'il veut c'est non pas imposer à la foule par l'appareil des armes et la pompe du conquérant, mais se présenter à son peuple comme le premier de ses bol-dats, comme le frère d'armes de tous ces hommes vaillants et forts qui se sont battus pour la liberté du monde, ces hommes qu'il aime comme il est aimé d'eux ! Il émane de lui, môme dans cette fête triomphale, cette cordialité simple qui séduit et conquiert la foule ; il montre au peuple avec fierté sa femme et ses enfants revenus bien portants aprèvs une si longue abson.ee. Il a arrêté son cheval face à la tribune et la Reine est venue prendre place à sa gauche, tandis que ses enfants se sont rangés derrière lui. La Reine, bien en selle, dresse dans son amazone de drap gris une frêle et nerveuse silhouette. Les années d'éprêuveS, les art< nées de dévouement et de charité ont donné à son sourire une gravite douce. Peut-être se dit-elle que l'amour de tout ce peuple va à elle parce qu'elle a consacré sa vie de Reine à soulager les misères, à soigner les blessés, à veiller sur les enfants sans mère ; peut-être se dit-elle cela et trouve-t-elle ainsi, à cette heure inoubliable, la plus noble récompense, une-récompense digne de sa grande âme. Mais, tandis mie la princesse Marie-José, dont la foisonnante chevelure a été emprisonnée en deux tresses qui lui descendent sur le dos, s'agite, très grande, sur son grand cheval, le bourgmestre de Bruxelles s'est avancé et harangue le Roi d'une voix claire, au milieu du silence qui soudain, a succédé aux vivats éperdus. Le bourgmestre Mas harangue le Roi Sire, Depuis plus de'quatre ans, la capitale attendait cette minute. Elle l'attendait avec impatience, aveo fièvre, mais jamais le doute n'a ébranlé sa foi. Ella avait la certitude que, tôt ou tard, il lui serait donné de voir revenir vers elle, victorieux, le Roi dont elle avait, au début de la guerre, salué la noble et virile décision et dont l'exemple l'avait enflammée de cette abnégation généreuse qui élève et grandit le patriotisme au point de l'égaler à l'amour da l'Humanité. Oui, la Belgique s'est offerte en sacrifice pour un idéal qui plane bien au-delà des intérêts qu'enferment les limites de ses frontières.. Le peuple de Bruxelles a connu des souffrances indicibles, mais il les a supportées sans plainte, les yeux tournés vers l'avenir. La rentrée du Roi et da l'armée, dans 1'apotliéose du triomphe, lui apporte aujourd'hui la récompense qui lui était due et c'est frémissant de bonheur que, fier de pouvoir parler en: son nom, j'enveloppe dans un même hommage de gratitude et d'admiration nos soldats incomparables, dignes partenaires des troupes alliées aux côtés desquelles ils ont combattu, et l'héroïque souverain qui, à leur tête, a conquis, pour lui-même, et pour la Belgique, dont il incarnait l'âme, la gtoire la plui. pure. Qu'il me soit permis d'associer êi cei hommage notre Reine dont nous sa, vions, dès a.vant la guerre, la bonté, mais dont nous connaissons aussi maintenant le mâle courage, et de confondre nos jeunes princes et la gracieuse princesse Marie-José dans les acclamations que nous adressons à ceux dont les exemples guideront leur avenir. Vive le Roi, vive la. Reine, vive 1» famille royale ! Yive notre armée, vivent nos alliés! Des acclamations interminables montent vers le ciel; un aéroplane qui fait des évolutions savantes et périlleuses ii l'air de cabrioler d'aise dans l'azur..,. La réponse du Eoi Messieurs, La Reine et moi, nous' avons écouté avec émotion les éloquentes paroles quo vient de nous adresser votra bourgmestre. C'est pour nous le plus beau Jour dd notre existence que celui où nous rentrons dans cette belle capitale délivrée enfin par la victoire des alliés, après quatre ans et demi d'épreuves. Nous nous réjouissons du fond du cœur de retrouver nos concitoyens qui n'ont jamais cessé d'avoir une foi ardente dans la victoire du Droit, qui n'ont jamais cessé de rester le fronl haut comme il sied h des hommes li« bres, devant les brutalités de l'oppresseur.Je viens leur rendre ici un profond hommage d'admiration. Messieurs, e Nous saluons en M. Max l'exemplê des plus hautes vertvs civiques. Votra Bourgmestre a été héroïque; il s'flsi placé au premier rang des plus illus-Ires magistrats communaux de notra 1 Histoire.. De la porte de Flandre à la Place de BronckerO Sitôt, le bourgmestre remonte dans sa limousine, et, suivant le peloton des hauts et fiers gendarmes, prend place drjis le cortège ; d'autres autos emmènent les autorités communales. Jja famille royale suit en cavalcade. Ce sera jusqu'à la Chambre une marche à la gloire, la plus émouvante,la plus extraordinaire, la plus formidable ovation dont jamais peuple ait honoré un souverain ! C'est l'apothéose ! Des trottoirs à la cime des maisons, c'est un pa-pillottement do mouchoirs blancs agités dans le soleil, un ouragan d'acclamations, un torrent de joie ! Les cloches sonnent aux clochers, un corps de musique fanfare place Sainte-Catherine ; des clairons sonnent aux champs ;Iee drapeaux s'inclinent et saluent ; une . auto, transformée en corbeille de fleurs rares — les fleurs de la Reine — promène par les rues son hommage embaumé ; la vague des clameurs s'enfle au passage du cortège ; le souvenir de cinquante mois de détresse morale et de privations s'envole par dessus les pignons, dans un souffle immense d'allégresse ! On se rit dans la figure ; on serre des mains inconnues ; des femmes pleurent ; des homme,; poussent des cris sans significa tion et sacs suite, s'enrouent S clame# le transport de la minute qui passe ! Au coin du Marché-aux-l'oulets et d*' boulevard Anspach, le décor sans pareil des hautes constructions, décorées de la base aux toits, apparaît brusquement dans le resplendissement de la lumièr» en fête ! Ijos enfants des écoles, rangé* sur les bords du trottoir, parmi les soldats, élèvent des milliers de drapelets e^ jettent des fleurs sous les pas du clievai do la Reine.. Jamais Bruxelles n'a vu — et assurSi. ment jamais Bruxelles ne verra plus —•« pareille frénésie de l'âme populaire. Samedi 25 novembre 5918 ANNEE. - f 6 _ Samedi ^5 novembre 1918

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