La nation

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s.n. 1914, 15 Avril. La nation. Accès à 28 mars 2024, à https://nieuwsvandegrooteoorlog.hetarchief.be/fr/pid/k06ww77s3p/
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4e ANNEE. Nn 11. — Le Numéro : 5 centimes. Affilié à l'Union de la presse périodique Belge. Mercredi 15 Avril 1914 LA NATION « Pour la Culture Française. » Journal hebdomadaire paraissant le mercredi. « Pour la Culture Française. ABONNEMENTS : Belgique : 3.50 francs; France : 5 francs; Étranger : 7 francs. BUREAUX DU JOURNAL : 106B, Rue de l'Arbre-Bénit, Bruxelles Téléphone B 1848 Les manuscrits non insérés ne seront pas rendus. Il sera rendu compte de tout ouvrage dont deux exemplaires seront envoyés à la rédaction. ANNONCES : On traite à forfait. La leçon d'un grand américain J'ai sous les yeux le texte imprimé de deux conférences données à Paris par M. James Hyde sur la « littérature française aux Etats-Unis » et « les relations historiques franco-américaines ». Qui ne s'est ^familiarisé aujourd'hui avec le nom de James Hyde dont René Doumic a dit : « il n'y a pas d'Américain plus connu à Paris, ni de Parisien plus Connu en Amérique »? C'est l'apôtre élégant, souriant et généreux de la culture française dans le Nouveau Monde, le sagace Mécène auquel on doit l'échange périodique de professeurs et conférenciers — ambassadeurs spirituels — entre chaires universitaires de France et des Etats-Unis. 11 consacre à son idéal sa parole si communicative, sa pensée, sa fortune, son influence, toutes les ressources d'une vie qui pourrait se confiner dans une voluptueuse oisiveté. Pourquoi? Par pur reconnaissance de gentilhomme yankee envers la France, dont les Lafayette et les Rochambeau aidèrent si précieusement les colonisateurs de l'Amérique du Nord à secouer le joug d'une tyran-nique mère-patrie, dont un autre geste (Napoléonien) agrandit au double leur territoire, par la cession de la Louisiane... Pour cela, sans doute; car si une partie de la Belgique oublie qu'à la France elle doit surtout son indépen-d inceson existence-nationale même. et la libération et l'opulence de sa métropole anversoise, peu d'Américains pratiquent la gratitude à la mode de M. Perrichon. Pour cela sans doute, mais aussi et principalement parceque aux yeux de M. Hyde, comme aux yeux de tous ses compatriotesinstruits, il est difficile de se donner pour un véritable civilisé si l'on ne pratique pas la plus belle, la plus limpide forme d'expression de la civilisation :1a forme française. Ecoutez-le : L'Américain lettré considère l'étude du français comme un des moyens les plus efficaces de culture. Dans le monde ancien, le grec fut à l'origine, la langue d'éducation universelle; au Moyen-Age, le latin prit sa place; le français remplaça le latin, après Louis XIV et sa gloire et sa diffusion grandirent tout le long du XY^OI"1" siècle. Berlin est loin de l'Amérique ; mais il est amusant de rappeler qu'en 1783, l'Académie prussienne mit au concours le sujet suivant : -< De l'universalité de la langue française ». Le prix, vous le savez, fut décerné à Rivarol qui célébra la prééminence de la langue française, reconnue et maintenant avouée dans toute l'Europe, l'ordre direct et la construction de sa phrase d'où résulte cette admirable clarté, base éternelle de notre langue : « Ce qui n'est pas clair, dit-il, n'est pas français ». Ainsi parle un intellectuel américain du XXme siècle. Constate-t-il là quelque chose que quelqu'un ignore? Oui. Les pauvres dupes flamandes de nos flamingants ignorent ce rayonnement séculaire prestigieux et fécond de la langue française. Leurs mauvais bergers le leur laissent ignorer à dessein. Ces iconoclastes qui rêvent, dans un but d'intérêt personnel, depuis longtemps percé à jour, de flamandiser l'Université de Gand après avoir fla-mandisé l'enseignement secondaire et préparé la flainandisation de l'école primaire, leur laissent ignorer avec le même soin,ce fait si éloquent, rappelé par notre grand historien Pirenne : nos patriciens et bourgeois flamands du XVImesiècle adressaient des pétitions au gouvernement français pour qu'il créât chez eux des Universités françaises, afin de leur éviter la nécessité d'envoyer leurs enfants faire au loin à Paris, leur indispensable éducation supérieure en français. Les paysans i et ouvriers flamands dont on veut que les rejetons demeurent, comme leurs pères, unilingues ou pour mieux dire (1) Le mot est de M. Hyde. patoisants, soupçonnent-ils que les plus larges et éclectiques esprits d'un autre temps, Leibnitz, Frédéric II, roi de Prusse, Catherine de Russie, notre prince de Ligne (feld-maréchal autrichien) mettaient la langue de Voltaire et la culture qu'elle exprimait au-dessus de toute autre lumière et qu'en notre ère une véritable légion étrangère de la littérature française (1), s'est naturellement, - spontanément constituée pour pratiquer le verbe incomparable d'Anatole France, légion étrange englobant des cubains, tels que José Maria de Héredia, des grecs tels Jean Moréas et Zamacoïs, des flamands tels que Maeterlinck, Rodenbach et Verhaeren, des argentins tels que Nicodemi, des italiens tels que Gabriel d'Annunzio? C'est l'Américain James Hyde qui évoque, épouse et propage ardemment ces exemples. Et songez à la signification d'un tel fait! M. James Hyde est citoyen d'une immense et puissante République qui s'est créé des débouchés économiques partout et qui dispose pour ses relations mondiales, d'une langue — la langue anglaise peut-être encore plus universelle que le français, si l'on ne tient compte que du nombre d'individus qui la parle. Il n'en juge pas moins utile, nécessaire, indispensable, le supérieur instrument de communication qu'est le verbe de la Gaule moderne, avec toute l'idéologie qui en ruisselle, et il le proclame en s'appuyant sur les données de l'expérience et de l'histoire, sans phrases emphatiques, sans se fâcher, comme les sectaires qui ont tort, mais avec cette flegmatique bonne huaieur, Getfe tranquille assurance des hommes qui ont raison, qui se sentent en possession d'une vérité inattaquable. Tand.s que nos flamingants, les yeux désorbités, les cheveux hérissés, l'écume à la bouche, sont obligés de s'avouer eux-mêmes des fanatiques (Camille Huysmans dixit), en poussant à se dispenser de la langue française de malheureux flamands qui ne disposent pas même à priori d'une langue, tout au plus d'un fragment, d'un lambeau de langue représenté par un patois variable de province belge en province belge et aussi peu intelligible à une moitié du pays et au reste du globe que le danois ou le sanscrit ! On ne saurait mieux comparer la population des Flandres en sa condition natale dont on veut l'empêcher de s'évader, qu'à une tortue dont on chercherait à rendre tout à fait hermétique la lourde carapace de façon qu'elle ne puisse plus projeter la tête hors de sa prison pour respirer un peu d'air libre, entrevoir un peu de lumière, goûter quelque chose de la vie. Et ceci en un temps où la généralité des hommes, non contente de la faculté de parcourir rapidement la terre,se fabrique des ailes pour se rendre maîtresse de tout l'espace.Mieux encore à l'élite flamande qui pratique spontanément et traditionnellement le français et lui doit sa qualité d'élite, on rêve d'imposer la carapace hermétique en la contraignant, par la flamandisation de l'enseignement supérieur, à revenir à son primitif état, pour se faire comprendre de ses « frères inférieurs ». Il faut niveler par en bas; non point aider ceux qui végètent dans les bas-fonds à remonter, mais condamner ceux qui ont conquis les hauteurs à redescendre! C'est absolument comme si M. lamesHyde, par charitable espritd'éga-lité, proposait à cent millions d'Anglo-Saxons, d'Allemands, d'Italiens ou de polyglotes de l'Amérique dn nord de faire de l'iroquois leur principal idiome puisqu'il reste encore quelques milliers 3e malheureux Iroquois qui n'enten-3ent pas autre chose. Il prêche, au :ontraire, l'acquisition du français à :eux-là mêmes qui détiennent d'autres :t puissants moyens de communication îvecla grande majorité des habitantsde a planète. Quelle leçon pour les dupes it victimes de la folie flamingante ou jlutôt du crime flamingant!... Gérard HARRY. ' La part du Rêve Rien n'est plus difficile à remplir que la tâche de chroniqueur fantaisiste, et je voudrais ici, pour une fois, attirer votre attention, fidèle lecteur, sur le triste sort des humbles amuseurs que nous sommes ! Un de mes plus sympathiques confrères, ce pauvre Oncle Justinien, après avoir pendant quelque temps collaboré à cet admirable Soir, où il dissertait ■ sur des choses profondes, avec art, a dû s'aliter en proie à une horrible migraine. Et voilà. Le journalisme vous prend un brave bruxellois, bien vert, bien spirituel, lui fait pondre des « papiers » très malins, d'au moins quinze lignes, chaque fois. Cela dure quatre, cinq, six jours et puis, le ressort caste. Versons un pleur ! Je me demande si je ne ferais pas mieux, moi qui suis encore jeune et beau, de me faire débardeur plutôt que de continuer à écrire. C'est un métier si dangereux... Crispin de PASSE ÉCHOS Dans la colonie française. Par décret du Président de la République française, MM. Victor Lecherf, Victor Malguy, Lucien Lemoine, Dathis, directeur de la Société française de Banque et de Dépôts, et H. Viel, tous membres de la Chambre française de commerce et d'indus trie de Bruxelles, ont été nommés conseillers du commerce extérieur de la France. * * * Jemappes et W aterloo. Le parlement a, comme on le sait, décrété que le champ de bataille de Waterloo ne pourrait subir aucun changement sans l'autorisation du Gouvernement. Nous applaudissons des deux mains au vote de cette loi. Assurer le respect d'un champ de bataille, c'est assurer le respect des morts des vaincus aussi bien que de ceux des vainqueurs. Et nous n'oublions pas qu'il y eut des Belges parmi les uns comme parmi les autres. Ce que nous demandons, c'est que la disposition de loi votée par la Chambre soit étendue au champ de bataille de Jemappes. Car Jemappes, c'est la graîne de notre . indépendance et de nos libertés, que la Grande Semeuse d'Idées, la France, abandonna généreusement dans nos sillons. Quel député wallon prendra l'initiative de la proposition? * * Leur patriotisme. Il s'est tenu à Gand, nous apprend le Soir, un congrès des étudiants de la Grande Néerlande (Groot Nederlandsch Studenten-kongres).La Grande-Néerlande groupe sous son drapeau des étudiants de Leyde, Utrecht, Rotterdam, Anvers, Liège, Louvain et Bruxelles.Dans son discours d'ouverture, le président a exprimé l'avis que la Flandre n'est pas perdue pour la Grande-Néerlande. Tous les orateurs ont appelé la Flandre la Néerlande méridionale (Zuid Nederland). Un professeur hollandais, M. Colenbrander, a fait une conférence sur l'année 1814, où il a exalté l'unité intellectuelle de la Hollande et de la Belgique flamande. Reconnaissons qu'il a bien voulu dire que cette unité n'est pas politique. D'autres orateurs ont affirmé à tout propos que les Flamands sont des Néerlandais. On a chanté le 11 Vlaamsche Leeuw " et le H Wilhelmus van Nassauwen n. Pas de " Brabançonne n, naturellement. En résumé, ce congrès fut bien celui de la Grande-Néerlande. La Belgique en était absente. Pas un mot d'elle. Ces étudiants flamands de Liège, Louvain, Anvers sont-ils encore Belges? Ils ne sont plus que Flamands, ou mieux Néerlandais. Voilà le mal qu'on a laissé grandir en Belgique. Après tout, que nos bons flamingants regrettent le temps de l'odieuse domination hollandaise, c'est dans l'ordre. Mais alors, qu'ils gardent de Conrard le silence prudent lorsque certains de nos amis évoquent avec amour l'époque où nous étions rattachés à la France. Je sais bien qu'à ce prix notre autonomie devient une chose précaire. Mais ce n'est pas nous qui aurons commencé.*- ¥ Verhaeren est-il Belge ? Voici ce que nous apprend le Matin d'Anvers : n II y a des choses qui sont tellement " nature 11 qu'aucune imagination de romancier ne pourrait décemment les produire. L'aventure qui advient à Emile Verhaeren est de ces choses-là. Verhaeren réside une bonne partie de l'année dans les environs de Paris, mais il a son domicile régulier dans une petite région voisine de la frontière, en territoire belge, où il passe de longs mois. Le grand poète avait donc demandé, conformément à la loi, son inscription sur les listes électorales de ce patelin. Un agent clérical a demandé aussitôt la radiation de Verhaeren en donnant comme raison que le poète n'a pas le droit de voter en Belgique... parce qu'il n'est pas Belge! " La cour d'appel de Bruxelles a eu à examiner ce dossier électoral et elle a décidé que Verhaeren devrait faire la preuve de sa qualité de citoyen belge!. . " N'est-ce pas exquis? La Belgique a l'honneur de compter parmi ses enfants un des plus nobles poètes de l'heure présente, une des gloires littéraires les plus pures qu'il y ait en Europe — et on ne trouve rien de mieux que de lui contester sa nationalité, de vouloir le priver de ses droits de citoyen, de le renier comme Belge! " Si Verhaeren ne prouve pas par des documents authentiques qu'il est Belge, il ne pourra pas voter, na ! n Cuistrerie, muflisme ou simplement stupidité ? " Courage. Un journal flamingant d'Anvers vient de publier, nous raconte notre excellent confrère Y Echo commercial, un article très courageux dans lequel il répond aux attaques grossières contre la Hance élucubrées par certains journaux belges. D'après ces feuilles, la République Française, après le scandale Rochette et l'affaire Caillaux, ne serait plus qu'un monceau d'infecte pourriture. Notre confrère flamingant fait très justement remarquer que, si la France est en ce moment l'objet de toutes les conversations, c'est que les Français n'ont pas l'habitude de laver leur linge sale en famille. Ils travaillent au grand jour. 11 S'il s'est perpétré u:i crime quelque peu intéressant, dit le iournal en question, ou bien une escroquerie en dehors de la banalité ou un assassinat légèrement teinté de romantisme, le même jour nous voyons paraître les journaux parisiens avec les portraits des coupables, de leurs avocats et du juge d'instruction photographiés dans le cabinet de ce dernier ou dans la prison. Et alors ces gazettes nous racontent au long et au large ce que l'accusé "et les témoins ont raconté au juge d'instruction. En France, la justice siège dans une maison de verre. " Le journaliste flamingant qui écrit ces lignes estime-t-il que voilà un défaut? Non, il se plaît à reconnaître le contraire. En France, dit-il, on voit les scandales du régime ; chez nous, on ne peut que les deviner. Mais ceci veut-il dire que notre régime est beaucoup meilleur que celui de de la France? Et notre confrère cite un exemple... qui doit le rendre légèrement suspect à ses lecteurs germanophiles. En Belgique, dit-il en substance, il y a dans l'air une odeur de pots-de-vin. Par exemple, l'affaire des huits canons Krupp sur laquelle on a demandé des éclaircissements à maintes repiises. Il est en tout cas certain que huit canons ont été commandés à la firme Krupp, et qu'ils ont été payés sans retard — et que ce sont des canons pour lesquels le gouvernement belge n'a pas de destination du tout! Pots-de-vin, canons commandés et payés à une maison allemande, marchandise dont la Belgique n'a que faire, scandales étouffés, tout cela n'est pas très propre. Et les feuilles qui tombent à bras raccourcis sur la France qui a le courage de ne pas dissimuler ses vicissitudes, feraient bien de regarder autour d'eux pour voir si, dans notre pays, on n'étouffe pas des affaires bien plus graves encore. Certes, il en faut du courage à ce confrère flamingant et... nous serions bien curieux de savoir combien de désabonnements lui a coûté cette attitude. » * A la Chambre de commerce belge de Lille. La Chambre de commerce belge de Lille vient de tenir son assemblée générale annuelle sous la présidence de M. P. Mel-chior, consul de Belgique. M. Lacoste, secrétaire, dans son rapport sur l'exercice écoulé, passa en revue les dernières statistiques du commerce spécial de la Belgique avec la France et commenta les conclusions que les groupements professionnels des deux pays ont déjà formulées à ce propos. Le développement croissant des transactions commerciales entre les deux nations voisines soulève journellement quantité de problèmes, tant au point de vue des débouchés nouveaux qui s'ouvrent à l'activité des plus diligents qu'au point de vue des questions de douane et de transport pour lesquelles on réclame sans cesse des améliorations.M. Allenet exposa ensuite la situation financière; puis tous les membres sortants du comité administratif furent réélus à l'unanimité. VERS L'UNION NATIONALE i Ces jours derniers, quelques citoyens, excellemment intentionnée, ont fondé un groupement ayant pour objet de rétablir l'union nationale. En des temps, lointains peut-être encore, hélas ! où la raison et le bon sens auront repris leur empire en ce pays, on aura peine à comprendre que des particuliers aient eu à entreprendre une tâche qui incombe essentiellement aux pouvoirs publics; on aura plus de peine à comprendre encore, à s'expliquer que les pouvoirs publics, à notre époque, bien loin de chercher à rétablir l'union, ont eux-mêmes organisé la discorde et mis le plus beau _zèle à l'entretenir et à la propager.Pour être unis, il nous faut vraisemblablement nous comprendre : nos législateurs s'y sont appliqués en séparant le pays par deux idiomes diamétralement opposés. Un pince-sans-rire s'est un jour avisé de découvrir et de déclamer pompeusement qu'un peuple a le droit d'être jugé et administré dans sa langue. Personne ne lui avait rien demandé : il aurait pu plus utilement passer son chemin. L'écho ne répondit rien. Il enfla sa voix : quelques badauds lui firent chorus. Le parlement, dès lors, se crut obligé d'intervenir. Il trouva l'argument irrésistible et s'inclina. Le peuple flamand a le droit de manger du foin ; il n'en réclame pas, préférant manger autre chose : donc il faut lui imposer cette nourriture; telle est la logique parlementaire. Or, on finit par s'apercevoir que le peuple flamand n'a pas de langue, pas plus que le peuple wallon pour qui, chose curieuse, la question ne fut pas posée, pas plus que n'importe quel peuple qui va à l'école apprendre la langue nationale et réserve ses patois pour ses-menues occupations. Le peuple flamand n'ayant pas de langue, mais des dialectes aussi nombreux que variés, on décida de lui en donner une.Le français paraissait tout indiqué, car il peut lui servir à quelque chose. C'est d'ailleurs quelque peu la lan'gue nationale. Les hommes que nous avons coutume, par un préjugé très enraciné, d'appeler nos représentants, daignent s'en r -i ; même, et non sans quelque d ..iction, ceux qui s'en déclarent les plus irréductibles adversaires... pour les autres. A peine une demi-douzaine de ces Messieurs s'expriment dans la même quantité d'idiomés régionaux, soit qu'ils n'aient pas eu le loisir d'apprendre autre chose, soit qu'ils y trouvent toute sécurité pour dire énormément de bêtises, sans être compris; le parlement étant fait pour parler, ce qui ne signifie pas nécessairement parler raisonnablement, ils trouvent ainsi moyen de gagner honnêtement leurs 4,000 francs. Mais le français ne pouvait suffire; il nous fallait, au nom de l'unité nationale, deux langues. Une seule langue! passe encore pour des pays insignifiants comme l'Allemagne, la France, la Russie, pour les Wallons et les FI imands faisa.it partie de la nation française; mais pour les Wallons et les Flamands de ce côté-ci de la frontière, pour leur immense population, c'est absolument insuffisant. Il nous fallait une deuxième langue, ne fut-ce que pour créer, en compétition avec le vulgaire mérite, des titres spéciaux à la conquête des emplois publics, ne fut-ce que pour servir d'exutoire au trop plein de nos finances, en multipliant les dits emplois, en créant une armée de traducteurs, des montagnes de traductions parfaitement inutiles à la masse, qui les paye, mais bienfaisantes pour quelques-uns, ne fut-ce enfin que pour doter d'élégants sobriquets nos primitifs noms de viiles et de villages; mais, en principe, pour être compris par le peuple flamand, dès que, bon gré mal gré, on la lui aura fait ingurgiter. Nous avons bien, comme langues disponibles, le volapuk, l'esperanto, qui ont le mérite de tendre à l'universalité. Mais ils n'ont pas celui, exigé, d'être des langues « caractéristiques de races ». Vous me direz que les lentes et continuelles subslructions des unes sur les autres, à travers les siècles, n'ont guère laissé subsister en fait de races que celle des Samoyèdes. 11 ne restait donc plus que le recours à la langue celtique, qui fut la vraie langue de race, tant de ceux qui ne s'appelaient pas encore Flamands que de leurs frères aujourd'hui dédaignés qui ne s'appelaient pas en:ore Wallons ou Français. Elle parut sans doute un peu démodée, même pour l'usage des Flamands, qui l'avait conservée plusieurs siècles après leurs congénères, latinisés. C'est pourquoi la défroque d'Arlequin que constituent les divers et primitifs jargons, reliques délaissées, dans les Flandres, de nos communs ancêtres francs, conquis, partout ailleurs, comme île vulgaires fransquillons, par la séduction d'idiomes moins barbares, devant nécessairement servir à l'édification de cette langue spéciale, qu'il fallait à tout prix imposer, « par respect de leurs droits », à ces provinces déshéritées. Le reste fut entrepris, avec le plus grand sérieux, par un consortium ayant son siège à Oand, sous la raison sociale « Académie flamande ». Nos immortels ont bien travaillé; dans le domaine du grotesque, le seul qui leur était assigné, ils ont réalisé des merveilles.C'est ce produit que nos missionnaires font ingurgiter à nos frères du Congo, qu'ils ont mission « d'instruire » comme seule et authentique langue nationale de la inére patrie. Ont-ils jugé qu'elle est le mieux appropriée à l'estnétique de ces races primitives? N'ont-ils trouvé que ce moyen de se justifier contre les accusations des journaux français, qui les dénoncent comme agents de l'Allemagne? En tous cas, ils ont très intelligemment pensé que c'était le meilleur viatique à mettre aux mains de leurs jeunes éleves, pour voguer à travers le monde, et même échouer devant les tribunaux de Bruxelles, où ils ont la ressource d'opposer un hermétique « Kan niet verstaan » aux questions embarrassantes du président. Leur enseigner la mœdertaal, c'est déjà très joli. Mais on a trouvé mieux : on en fait des apôtres de l'idée. Catéchisés par nous, emberlucoqués des doctrines flamingantes, ils viennent, à leur tour nous catéchiser. J'ai eu récemment, en tramway, à Bruxelles, le désopilant spectacle d'une algarade provoquée par un nègre gourmandant copieusement deux femmes du peuple qui avaient l'audace de deviser en français, en sa présence".Pour faire preuve de bon goût ces ménagères auraient dû s'exprimer en flamand, sans doute? Vous n'y êtes pas, ou plutôt, vous n'y êtes plus. La langue maternelle, c'est désormais le néerlandais: notre national Kamiel, grand prêtre du flamingantisme, vient d'en faire au Parlement la solennelle révélation. Inclinons-nous respectueusement devant l'oracle de cet augure, dont la démocratie désinvolte s'accommode admirablement du compérage réactionnaire, pour tenir courbé sous la botte du despotisme un peuple voué par son ignorance et son isolement à la misère et à la barbarie. Cette langue nationale nouvelle lui permet au surplus d'adopter la devise nationale nouvelle : « Je maintiendrai » formule lapidaire, que notre sagacité aura ainsi complétée... « le carcan à la gorge des Flandres ». Néanmoins les campagnardes flamandes continueront à apprendre à leurs enfants leurs frustes et divers patois, sans se douter qu'elles leur enseignent le néerlandais. Or, pendant que nous nous épuisons en discussions byzantines sur des chimères de races et de langues appropriées à ces races, les Hollandais évoluent. Gens pratiques et de bon sens, se rendant compte que les langues sont faites pour être comprises par le plus de monde possible, ils ne se font aucun scrupule de franciser de plus en plus la leur. Nous adoptons leur langue; ne vous étonnez pas qu'un de ces jours, libérés de fous préjugés, ils nous rendent notre politesse en adoptant la nôtre : le français, comme langue nationale, Ce sera la plus spirituelle répartie à notre glorieuse équipée de 1830, qui a dépouillé notre industrie des immenses débouchés de leur marine marchande... pour nous engluer dans le marécage de la moedertaal. « L'union fait la force », reste la facétieuse devise nationale. S'il avait voulu une fois, par hasard prendre son rôle au sérieux, le Parlement aurait pu préparer... pour l'avenir, cette union, facteur de force, en introduisant dans la loi scolaire un article imposant l'enseignement du français dans toutes les écoles primaires. II ne l'a pas voulu. 11 pouvait au moins subordonner cette obligation à l'acquies-sement des pères de famille : il ne l'a pas voulu non plus, car il savait que nulle part, en pays flamand, le père de famille ne s'opposerait à ce bienfaisant enseignement; or pour lui la volonté des pères de famille n'est respectable que pour autant qu'elle concorde avec la sienne. Une éclaircie de bon sens lui avait fait comprendre l'aberration de prétendre instruire des enfants, fut-ce en pays flamand, dans une langue qui leur est absolument inconnue. Mais les vociférations de quelques lunatiques d'Anvers, la menace de « nouvelles mâtines brugeoises », l'ont ramené immédiatement à la discipline flamingante : La Flandre doit rester fermée à la civilisation ; tant pis pour qui s'y aventure.

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Cet article est une édition du titre La nation appartenant à la catégorie Katholieke pers, parue à Bruxelles du 1914 au indéterminé.

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