•Cn 151 QUATRIÈME ANNÉE mai 1918 PRIX DU NUMERO — Élastique, de zéro à l'Infini (prière aux revendeurs de ne pas dépasser cette limite) LA LIBRE BELGIQUE J'ai foi dans nos destinées, un Pays qyi se détend s'impose au respect de tous ce pays ne oérit pas! Dieu sera avec nous dans cette cause juste. ALBERT. Roi dfs Belges (4 août 1914). Acceptons provisoirement les sacrifices qui nous sont imposés... et attendons patiemment l'heure de la réparation A. MAX. fondée le 1er février 1915 Envers les personnes qui dominent par la force militaire notre pays, ayons les égards que commande l'intérêt général Respectons les règlements qu'elles nous imposent aussi longtemps qu'ils ne portent atteinte ni à la liberté de nos consciences chrétiennes ni à notre Dignité Patriotique. y Mou MERCIER. BULLETIN DE PROPAGANDE PATRIOTIQUE - RÉGULIÈREMENT IRRÉGULIER NE SE SOUMETTANT A AUCUNE CENSURE ADRESSE TÉLÉGRAPHIQUE kommandantur - bruxelles BUREAUX ET ADMINISTRATION ne pouvant être un emplacement de tout repos, Us sont installés dans une cave automobile ANNONCES : Les affaires étant nulles sous la domination allemande, nous avons supprimé la page d'annonces et conseillons à nos clients de réserver leur argent pour des temps meilleurs Rékapitulons Il y a 36 façons de partager l'humanité. Je n'en connais qu'une où la division se fait sans bavures : les honnêtes gens et le reste. Ça, c'est net commejdu beurre coupé au fil. On n'est pas honnête à moitié. Du moment qu'on ne l'est pas tout à fait, mais là, TOUT A FAIT, on glisse dans la mare d'à côté et on y reste. L'honneur est comme une île escarpée et sans bords... Ce n'est pas parce que Musset 1 a dit. C'est ainsi paice que ça ne peut pas être autrement... Heureusement I Si l'honnêteté n'admet ni poids, ni mesures, la malhonnêteté, par contre, est toute en nuances. La pire façon d'être malhonnête consiste à parler à tout bout de champ de son honnêteté, quand on n'est qu'une fripouille. Le Boche, qu'il s'appelle Czernin, von Hertling ou von n'importe quoi, a, entre autres spécialités, celle-là. H l'a même réquisitionnée pour lui tout seul, depuis surtout que le nom de Gott — ce très vieux feld-maréchal qui suit Guillaume et précède Hindenburg — est mis à toutes les sauces pour masquer le goût plutôt ... rance de l'honneur allemand. Prenons-la donc avec des pincettes la fameuse honnêteté MADE IN GERMANY et examinons-la rapidement en nous pinçant le nez. C'est curieux à force d'être sale. Donc, en 1914, un ou plusieurs Serbes assassinent un archiduc d'Autriche et sa femme. Acte aoominable, certes. Mais, chose curieuse, le vieux François-Joseph qui pourtant en avait vu bien d'autres sans sourciller, au cours de sa chienne de vie, cette fois se fâche tout rouge. Ultimatum à la Ser ie. Conditions draconiennes. Cependant, — et ça c'est de l'histoire, — le petit Etat s'incline, si bas même, qu'il n'y avait vraiment pas moyen de ne pas se déclarer satisfait. Donc, pas de guerre... Ouais I... L'Autriche reçoit la réponse... et déclare la guerre. Mystère... Or, la guerre, c'était fatalement ia catastrophe mondiale puisque par le jeu des alliances, les nations allaient mécaniquement se ruer les unes contre les autres et |ouer au fameux concert européen une musique à faire craquer le monde. François-Joseph était ramolli. Mais, il avait sur les bords de la Sprée puante, un noble allié. Evidemment, le Kaiser allemand alla't bondir : « A quoi penses-tu, mon vieux Sadowa. Pas de ça I Je suis l'Empereur de la paix. Tu ne lis donc pas mes harangues? Les Serbes acceptent tout ce que tu réclames. De quoi te plains>tu ? Ta bouche... » Le Lohengrin de pacotille, le nez dans la bouche, roulant des yeux blancs, sous des sourcils froncés, réfléchissait. Ce pître Je la paix qui était avant tout l'apôtre de la poudre sèche, du glaive à moitié tiré et d'un tas de clichés pour militaires, ne desserra mîtne pas les dents, lui qui ne savait pas voir voler une mouche sans faire un discours. Il fallait déclan-cher la guerre. L'occasion était unique. Elle s'offrait d'elle-même. Et avec ça, tous les atouts dans la main. Je n'avais jamais bien compris ce que Donoso Cortès ambassadeur d'Espagne à Berlin vers 1849 écrivait à son ami prussien le comte Raczinski, familier du Roi : « je crois que la Prusse est vouée au diable depuis sa naissance et je demeure convaincu que par une fatalité de son histoire elle lui est vouée pour toujours ». Je comprends aujourd'hui : Guillaume II avait le diable au ventre en juillet 1914. Alors va commencer la série des malhonnêtetés, des bochonneries. D'abord, il est bien entendu que cette guerre, préparée et rêvée depuis près d'un demi siècle, sera une guerre DÉFENSIVE. La blonde Germanie, c'est entendu, ne pensait à rien, on est venu la bouskuler tandis qu'elle enfilait des perles ! Les cochons I Depuis longtemps leurs espions étaient sur les dents ici, là, partout. Leurs éclaireurs sondaient tous les terrains et marquaient les passages I Les reptiles de leur presse sifflaient avec ensemble et comme naïvement l'air qu'on leur inspirait Des mensonges habilement semés en pleine paix trompaient les voisins qu'on tenait embrassés ou qu'on accablait de politesses ; échauffaient ou endormaient au besoin l'opinion publique. Puis, brusquement, au signal donné, les armées étaient lâchées comme un torrent, au moment où l'on croyait encore à la paix I Le plan était d'ailleurs tracé, NE VARIETUR ; pour ces barbares qui comprenaient ainsi la DEFENSIVE, il fallait violer* la Belgique parce qu'ils pouvaient saisir à la gorge la France étourdie et découverte. Le coup du père Guillaume, quoi I Ces « honnêtes » boches nous l'ont assez seriné leur couplet avec trémolos : « Mais, dormez tranquilles, bons et chers Belges. N'êtfs-vous pas garantis par la parole et la signature de nos princes. Si la maison du voisin brûle, ne vous inquiétez donc pas ». Tandis qu'ils nous passaient du chloroforme sous les narines, les uhlans penchés sur le col de leurs chevaux blancs d'écume, scrutaient l'horizon à nos frontières. La pointe de leur lance faisait déjà de l'ombre sur le sol sacré de notre Patrie. Et puis, c'est l'honnête Kaiser qui lève un peu le masque : « Albert, mon gentil cousin, laisse-nous passer, je te donnerai beaucoup d'archent..» François-Joseph, n'était son gâtisme, aurait pu à son tour avoir un geste élégant : « Pas ça. La Belgique est liée à ma maison par trop de liens. Passe par où tu voudras, Fritz, mais pas par là. » l\on. Sa Majesté peu Apostolique releva tout uniment les basques de son bel habit blanc et se contenta de grogner à l'oreille de son complice sur la DEFENSIVE : « Recule un peu. Je vais aussi me coller le derrière sur ma signature. Ça fait qu'on ne la verra plus. Hi, lii, hil » Notre beau Roi Albert, trop gentleman pour ramasser la phrase un peu courte de Cambronne, répondit fièrement et HONNETEMENT.

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