Rire de la misère

Rire de la misère

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Redactie 17 août 2016 751

 « Always look on the bright side of life » chantait le messie crucifié Brian avec ses compagnons d’infortune dans la scène finale du tristement célèbre film « Life of Brian » des Monty Python. Brian et ses camarades ne sont pas les seuls à rire de leur sort. L’humour noir est un phénomène fréquent, surtout en temps de guerre. Bien que rire de la/sa misère semble étrange à première vue, cet humour comble un besoin psychologique. Les gens dans une situation critique utilisent l’humour comme un moyen de s’accommoder de l’impuissance dans des circonstances désespérées. L’humour noir permet en effet de gagner en contrôle de la situation en adaptant son attitude aux circonstances. Vous ne pouvez peut-être pas les maîtriser, mais bien votre attitude ; vous parvenez réellement à surmonter la situation.
L’effet de l’humour noir varie bien entendu considérablement selon que la blague émane des personnes menacées ou d’une autre. Nombre de ces blagues entre les personnes les plus exposées pendant la Première Guerre mondiale, à savoir les soldats, ne furent jamais consignées et demeurèrent donc inconnues. Mais les journaux du front, écrits par les soldats en personne, lèvent un coin du voile.

Our new insurance scheme. The Wipers Times, 03/07/1916, p. 11.
Certains journaux du front belges publiaient des articles humoristiques, mais l’exemple le plus marquant était le « Wipers Times » de Grande-Bretagne. Le titre fait référence à la prononciation anglaise d’Ypres. En février 1916, des soldats anglais trouvèrent en effet une presse à Ypres et décidèrent de publier leur propre journal humoristique du front. Le journal est par moment un chef œuvre satirique qui commente la guerre notamment par le biais de bulletins d’informations et de messages publicitaires fictifs. Il fait ainsi de la publicité pour des terrains à bâtir sur Hill 60, une colline près d’Ypres, plusieurs fois le théâtre de rudes batailles. On la dit « Bright, breezy & invigorating » et on la qualifie d’« excellent view of historic town of Ypres ». Le Wipers Times se présentait ainsi comme un journal faisant rire les hommes qui n’en avaient que très peu l’occasion. 

'Buildingland for sale', The Wipers Times, 12/02/1916, p. 11.