N° 2156. XLIe année. N° 24 le numéro fr. 0.50 Dimanche 22 Mars 1914. LA Fedération Artistique BELGIQUE : 15 francs par an. JOURNAL HEBDOMADAIRE FONDÉ EN 1873 BRUXELLES ET RUE DE LA VICTOIRE, 56. TÉLÉPHONE A 6162 ■teurs-Propriétaires : Edm.-L. DE TAEYE, VURGEY, VAN CLEE ETRANGER: 18 francs par an. Dépôts du journal : 7. galerie du Roi et maison Beethoven, 17, rue de la Régenoa et h Grand, à la Librairie Van Goethem. — Les abonnements prennent cours à toute date. — Il est interdit de reproduire nos articles sans en indiquer la provenance et l'auteur. — Les manuscrits ne sont pas rendus. — Les auteurs sont seuls responsables de leurs articles. SOMMAIRE. — Nature et Art spadois : Ch. Hault. — La Musique à Bruxelles : Aethur Wileord. —■ Lettre de Paris: Jhanne Helft. — Lettre de Liège : D. de D. — Lettres d'Anvers : E.-J. Verssaî?ds, C. B. — Notes et Paroles. — Les Concerts. — Courrier théâtral. — Bulletiji des Expositions. NATURE ET ART SPADOIS Les peiutres spadois ont constitué depuis longtemps un groupe wallon d'artistes dont la mentalité, le travail et le talent furent toujours adéquats aux mœurs, aux habitudes, à l'âpre et sévère beauté du petit coin d'Ardenne dont ils ont interprété le caractère et le coloris. Ils ont reproduit sur leurs toiles et panneaux, les multiples et attractifs aspects des sites et paysages où les hautes cheminées fumantes, où l'industrie et le mauvais goût n'ont encore apporté ni leurs fuligineux effluves, ni leurs boues salissantes, ni la tonalité orgueilleuse des habitations de parade. Sauf de rares exceptions, ils n'ont jamais voulu faire de réclame en faveur des attractions architecturales ou mondaines de leur petite cité. Certes l'Ardenne, notre Ardenne, ne ressemble pas à la Flandre, dont la matérialité grasse et prolifique se revêt d'une exubérante polychromie et d'une luminosité vibrante ; pas de rivières à ras de sol, larges et mirpitantes, coulant à pleins bords entre des rives herbeuses, au long des pacages bordés de saules et de peupliers glauques. Ce n'est pas non plus l'étendue immense où, sous le soleil, par les jours clairs, ondulent les moissons d'or, où, par les soirs d'octobre, la plaine se voile et s'embrume, estompant ses formes en aspects assourdis, parfois fantomatiques. Non. L'Ardenne ne présente point de ces grandeurs épiques. Le peintre spadois, du reste, ne saurait les mettre en page parce qu'elles n'émeuvent ni sa vision, ni sa sensibilité psychique. Mais il saura décrire ses coins aimés. Il garde toujours et partout l'amour indestructible du sol natal, de la Fagne qui ne finit pas, des lointaines forêts et des horizons qui la bornent, des ruisselets tourmentés et capricieux qui toujours parlent, des chemins creux qui ravinent les coteaux, des rochers gris stratifiés qui côtoient ou surplombent les sentiers herbeux.Il les aime à tel point qu'il croirait à une profanation, d'y ajouter, lorsqu'il les iuterprète par le pinceau, quelque suggestion enfantée par son caprice ou par son imagination. Si vous lui dites que l'artiste doit introduire dans son œuvre d'exacte copie, son sentiment personnel et son idéal propre, il vous répondra que la nature objective sait, elle-même, chanter toutes les gammes du sentiment et qu'il suffit pour la rendre subjective, de la peindre à son heure. Il l'étudié souvent à l'aube, quand déjà les horizons se dessinent argentés dans les lointains clairs ; quand, sous le bleu du ciel, moutonnent de petits nuages blancs, tour à tour se groupant, se dispersant et s'effaçant ; quand les premiers plans du sol se aïontrent en robustesse peu détaillée au devant des fonds gris sur lesquels ils s'affirment. Ill'analyse par les après-midi ensoleillés, quand des traits et faisceaux de lumière jaillissant de l'occident par-dessus les collines, viennent percer l'épaisseur des taillis et jeter sur le sol des taches d'or mobiles,"pour ensuite illuminer les fonds, où la mourante clarté solaire jette son voile transparent, au devant des tons azurés des lointains indécis. Il l'interprète encore par les crépuscules alanguis, à l'heure où, sur l'horizon lumineux, les monts endeuillés déjà, s'érigent en masses violacées, ourlées finement par le haut, d'un miuce reflet du soleil qu'on r\e voit plus. Avec quelle infinie délicatesse, avec quelle méticuleuse précision quelques uns de nos meilleurs peintres n'ont-ils pas exprimé, non la poésie tiiste de l'hiver blanc, mais sa décorative et féerique beauté, lorsque les arbies, les buissons et leur fouillis de ramilles se festonnent de-neige légère, diaman-tée ; lorsque les sous-bois fuyant en ondulations ouatées, se nuancent délicatement de rçse en se prolongeant vers des fonds visiblement brumeux? Avec quelle âpre et ardenuaise curiosité ne sont-ils pas allés,aux jours de gel et malgré le froid cuisant, vers les ruisseaux congelés pour y admirer et peut-être étudier les mille formes et uuances qu'a prises la glace au-dessus du

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